Extrait du journal
vêtus , l’un d’eux n’avait avec sa culotte, d’un gris jaune plus que fané, qu’un fichu de laine blanche noué comme on les noue aux fillettes. Ils marchaient, ils marchaient, n’étant suivis par personne. L’un tenait l’autre et visiblement le conduisait. Celui qui dirigeait s’arrê tait aux boutiques, mais n’hésitait jamais pour traverser une rue dans le sens du trottoir il est vrai ; l’autre, au contraire,avait toujours envie de pren dre à gauche les rues oui eussent pu le ramenerdans le sens ci’où il étaitparti. Je remarquai les deux tendances. Plusieurs personnes s’arrêtèrent pour demander à ces petits bonshom mes où ils allaient : — Voir Jean, répondaient-ils. Et ils repartaient. Longtemps je les suivis.Tout à coup ils traversèrent le grand boulevard dans sa largeur. Ces enfants étaient-ils perdus? Si petits comment pouvaient-ils être si loin de leur maison? Sûrement ils avaient fait un coup de tête, car le bonhomme conduit par 1 autre refu sait de prendre cette rue tout à fait à droite, lui qui avait toujours d’instinct voulu tourner à gauche. Me détournerai-je moi-même de mon chemin, les suivrai-je? Je cher chai en vain un agent pour lui signaler ces enfants. J’intéressai à leur sort une blanchisseuse, une fruitière, une marchande de jouets, qui, l’une après l’autre, les avaient,de leur porte, suivis du regard avec intérêt ; mais aucune ne pouvait quitter sa maison. Je conti nuai donc de suivre ces étonnants bonshommes marchant toujours. Une bonne d’enfant se mit à les suivre comme moi. — C’est pas à vous, me dit-elle, ça se voit; alors? — Alors, je les suis, répondis-je ; je n’ai pas le courage de les laisser seuls. — Surtout en ce moment, ajoutat-elle, où il y a de si méchants hommes pour les petits. A ce moment, la bonne me prit le bras et me dit en me montrant deux messieurs de l’autre côté du trottoir : « Le commissaire ! » Je courus au commissaire çt lui expliquai... il me répondit ce mot typique : « Signalez-les à un agent. » — Je n’en trouve pas. — Voyez ce que c’est, dit-il alors à la personne qui l’accompagnait, un agent en bourgeois sans doute. Celui-ci traversa la rue et interpella sévère ment les enfants au nom du commis saire. Le petit qui conduisait lâcha carrément celui qu’il avait entraîné et se mit à courir. Mais, comme dans les bons petits contes, les choses allaient se dénouer heureusement. Un jeune homme pas sait en petite charrette. Le moutard qui courait fut appelé par lui; il s’ar rêta. C’était sûrement le « Jean » audevant du iuel ces bonshommes étaient allés. — Qui êtes-vous ? demanda l’agent au jeune homme — Le frère de ce petit! — Sauvés, mon Dieu, pensai-je. La moralité fut que j’eus, pour me retrouver moi-même, plusieurs fois à demander mon chemin. Et comme je remerciais, on me répondit aimable ment, comme toujours, le mot qui résumait aussi le pourquoi je m’étais émue à propos de de mes deux mou tards échappés : « De rien ! » JULIETTE ADAM....
À propos
Fondé en 1868 par Toussaint Samat, Lazare Peirron et Gustave Bourrageas, Le Petit Marseillais était le plus grand quotidien de Marseille, affichant un tirage de plus de 150 000 exemplaires en 1914. D'abord républicain radical, le journal s'avéra de plus en plus modéré au fil des ans. Dans un premier temps très local, il fut l’un des premiers journaux à publier dans la presse des récits de procès judiciaires sensationnels dès 1869, avant de s’ouvrir aux actualités internationales.
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