Extrait du journal

67 LA MORTE VIVANTE DEUXIÈME PARTIE — L’AMANT D’OLYMPE Elles furent longues, longues comme des journées d’agonie, les heures de cetle nuit dévorante. Les bougies de l’oratoire où se proster nait M.de Rahon, et qui touchait à la cham bre à coucher de la comtesse, se consumè rent et firent éclater successivement leurs bobèches de cristal sans qu’Annibal s’en aperçut, tant il s’absorbait tout entier dans son ardente supplication. Enfin les ténèbres pâlirent, le jour parut, un rayon de soleil d’heureux augure se glissa dans l’oratoire. Le comte, plus glacé qu’un marbre, quitta lentement le prie-Dieu que ses genoux meurtris foulaient depuis si longtemps et rentra dans la chambre. Une sueur glacée baignait ses tempes ; son cœur battait à peine; quel arrêt allait-il entendre pro noncer ? Le vieux médecin, debout auprès du lit, lui lit signe de marcher sans bruit. Annibal l’interrogea ou plutôt l’implora du regard, et le médecin lui répondit d’une voix si basse que le comte devina ses paro les plutôt qu’il ne les entendit : — Plus de délire et plus de fièvre; elle dort, elle est sauvée. C’était vrai : la crise prévue avait eu lieu pendant la nuit. Mmy de Rahon ne courait plus aucun danger ; sa convalescence serait rapide, et la fausse couche, qui d’abord semblait inévitable, n’aurait certainement pas lieu. Le marquis de Saint-Maixent venait de commettre en pure perte une des plus lâches infamies qui soient inscrites dans les annales du crime...