Extrait du journal
Des retours de dates émouvantes nous portent, ces Jours-ci, à fêter des souvenirs qui, plus que toutes les propagandes et les contradictions passagères de la poli tique, valent pour raviver les sentiments par où furent liés nos cœurs de ceux de nos Alliés, à la minute où la destinée était en question, et où il s’agissait de savoir si nous ferions triompher l’idéal sans lequel la vie ne vaut pas la peine qu’on la vive. M. le maréchal Foch montrait, hier, une belle photographie, dédicacée par le roi d'Angleterre, qu’il venait de rece voir. Elle représentait le souverain anglais, notre grand vainqueur et le maréchal Haig, fraternellement réunis sur le sol de la France pour honorer les morts des glorieux combats qui furent livrés sur la frontière du Nord-Est. Et George V demandait au maréchal fran çais de lui signer en retour quelques épreuves de cette belle et symbolique image. Il souhaitait la remettre à de hautes personnalités anglaises. Si je rapporte ici ce menu fait c’est qu’il indi que qu’à côté de la politique officielle, si hésitante, il circule, en Angleterre, une veine d’amitié et d’estime francoanglaises. Pour être, souterraine et moins évidente que les discours de M. Lloyd George, elle atteste tout de même des sympathies durables qui ont leurs racines dans des tombeaux. Ce même jour, M. le maréchal Foch allait présider le banquet offert au géné ral américain Harbord, au vainqueur du Bois de Belleau. Je dis au maréchal que, mardi dernier, j’avais tout justement assisté à la céré monie qui fut célébrée sur ce point de notre territoire, à l’occasion du retour de cette fête du « Memorial Day », qui, depuis que les Etats-Unis sont entrés dans l’Histoire, pousse le libre peuple de cette libre République vers ses cime tières afin d’honorer, à une date fixe, les soldats américains qui tombèrent dans des combats en faveur de l’indé pendance. Ma raison particulière pour aller porter au cimetière du Bois de Bel leau ma piété et des fleurs, était que j’ai là un cher neveu américain, venu, 'loin de la maison paternelle, du jeune foyer qu’il avait fondé lui-même et où l’attendaient deux petits enfants, afin de mourir en brave pour les sublimes idées que la France incarne. Je n’ai vu nulle part une cérémonie plus émouvante. On se souvient de ce nom tragique « le Bois de Belleau », qui, pendant des années, illustra nos communiqués. Les Allemands s’y étaient fortifiés de telle manière que tout effort pour les en chasser aboutissait à une inutile boucherie. Là, comme au Che min des Dames, une mitrailleuse était en batterie derrière chaque arbre. L’en nemi tenait à cette position parce qu’elle commande la vallée qui, à travers Châ teau-Thierry et Meaux, l’amenait tout droit sur Paris. r Dans l’admirable lumière de ces jours de soleil intense, le Bois de Belleau se dressait derrière la tribune officielle comme un calvaire. Vraiment, les arbres dénudés semblaient des gibets dont on venait de dépendre les victimes. Et ces jeunes Christs du grand sauvetage étaient là, étendus, autant dire devant nos pieds, sous la figure de trois mille croix blanches alignées dans la prairie, ainsi que des régiments dont le défilé s’arrête. Et vous devinez quelle émotion ' a pu nous posséder tous, les officiels, les parents, les paysans, leé petits enfants des écoles quand nous avons vu se dres ser, dans sa haute taille de soldat sans peur et victorieux, entre le Bois, encore massacré de mitrailleuses, et le cimetière où dormaient ces jeunes gens qu’il avait conduits à la gloire et à la mort, ce général Harbord qui a commandé ici même l’assaut d’une audace inouïe par lequel l’avance allemande a été arrêtée. Le général Garbit, commandant la 4* division d’infanterie que le gouverne ment français avait eu l’heureuse pensée de choisir pour saluer nos amis, sur la place même de leur sacrifice, a prononcé des paroles qui sont allées au cœur de tous. L’inimaginable héroïsme dont le...
À propos
Fondé en 1868 par Toussaint Samat, Lazare Peirron et Gustave Bourrageas, Le Petit Marseillais était le plus grand quotidien de Marseille, affichant un tirage de plus de 150 000 exemplaires en 1914. D'abord républicain radical, le journal s'avéra de plus en plus modéré au fil des ans. Dans un premier temps très local, il fut l’un des premiers journaux à publier dans la presse des récits de procès judiciaires sensationnels dès 1869, avant de s’ouvrir aux actualités internationales.
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