Extrait du journal

de. Le jury l’a condamnée. Demain elle sera au bagne, dans la section des fauves. Et Von ne croit pas encore ! On a des doutes! On se demande si c'est bien vrai qu’on n'ait pas rêvé tout ça ! Quelquefois,"c'est juste comme à présent. On est dans un de ces heureux moments de 1 armée ou la maternité se fait encore plus souriante. C'est elle qui règne à peu près toute seule et partout. Dans les arbres tout troués de soleil, les branches sont pleines du gazouillement des mères voletant au tour des nids longtemps couvés. Allez au bois, écartez les feuillages, regardez si la fauvette fait du mal à ses petits. Oh! la bonne guerrière, toute frémissante d’une colère, si vous etlleurez tant seulement du doigt le> chers mignons attendant la bec quée ! Les autres mamans, celles qui ont veillé sur le berceau comme l’oiselle a veillé sur le nid, assistent, toutes caressées d'une joie, aux ébats bruyants des bébés évadés dans le soleil. Les volants cabriolent au-dessus des raquettes; les cerceaux cou rent de ci de là, cognent aux jambes des passants. Qui oserait se fâcher? Les enfants ont tous les droits, dans le mois oit la terre a toutes ses rieurs. Combien de gens pensaient à toutes ces douces choses l’autre jour, quand Ils ont lu tout à coup, au hasard de la feuille achetée en tlànochant. les horribles détails de l'aflaire Haegeii! C’est une épouvantable histoire. Figurezvous cela : une fillette martyrisée par sa mère dénaturée, avec la complicité du père ! L'enfant avait à peine neuf ans. l’âge exquis où l’on ne vit que pour se sentir aimé. Elle avait un joli nom de printemps, elle s'appelait Marguerite. Eh bien! on l'a vait crucifiée sur son petit lit comme un Jésus qui aurait son Calvaire tout de suite ! On la battait toute la journée ! On lui plon geait la tête dans un seau ••empli d'eau, quand elle pleurait ! C’était la mère qui faisait cela. Quand elle l’avait fait, voici ce que faisait le père ; il brûlait les lèvres de l'innocente avec un 1er rougi au feu ! — ça t’apprendra à être méchante! lui disaient les deux misérables. Pauvre mignonne! Elle était méchante, parce qu’elle se plaignait ! On la menaçait de l'enduire de pétrole et de la mettre en cendres. Un soir la mère l'a étouffée sous son oreiller, dans une rage. Le père regardait. On a jugé la mégère. Elle n’a pas eu un mot de regret. Quand on lui a demandé si elle avait pleuré le jour où elle avait perdu son premier enfant, elle a répondu : — Je n'ai jamais pu pleurer de ma vie. On l'a condamnée aux travaux forcés à perpétuité, sans circonstances atténuantes. Le mari passera devant une juridiction plus douce. Les pères ont, paraît-il, des droits it la barbarie que les mures n'ont pas. C’est la loi qui le veut. N'insistons point. il y a une morale ù tirer de ce sombre drame de famille. cette morale ne sera qu'une constatation ; on n’ose pas assez dénoncer à la justice les parents qui torturent leurs bébés. Les voi sins de l'affreux ménage Haegeli. quand ils parlaient, de Marguerite, l'appelaient la petite martyre. Tout le monde savait un lieu ou beaucoup; personne ne disait rien. Et c'est comme cela toutes les fois qu'un en fant est martyrisé ! On craint le dérangement, on ne veut passe mettre dans l’obligation d’aller té moigner, que sais-je encore? Pendant ce temps, il y a une mère qui commence par crucifier sa fillette et qui finit pat* l'é touffer ! Ali! trêve aux calculs de l'égoïsme, quand il s’agit de sauver un petit être innocent qui souffre tous les martyres! Pas de fausse pitié surtout pour les bourreaux! On a dit souvent que les mères qui tor turent leurs enfants seraient toutes frap...