Extrait du journal

Or, avant qu’elle ouvrît, j’ai parcouru la foire, Notre vieille foire aux santons, Et j’ai su, Bethléem, l'événement notoire Qui se passait dans tes cantons l Le bruit, d’ailleurs, s’en répandit sur les Allées Et vite se communiqua... On disait : Les santons tiennent des assemblées Pour se former en syndicat l On entendait des bruits dans les baraques closes. Plusieurs passants ont écouté. Et les santons parlaient,parlaient entre autres choses. De se Joindre à la C. G. T. On entendait des mots très extraordinaires : — Nous voulons, ayant combattu, S’écriaient-ils, ainsi que les fonctionnaires. Avoir, un jour, notre statut l S’ils sont en syndicat, sur les santons antiques Il faut chanter le Requiem I Mais qui (es a poussés vers de telles pratiques ? — L’instituteur de Bethléem l Il crie, avec sa voix de santon archaïque ; — Contre l’école des clergés Que l’on défende enfin cette école laïque Où s’en vont les petits bergers 1 Le maire, comme tel magistrat fort revêche Qui garda la clef du Saint-Lieu. Disait : — .le garderai, moi, la clef de la crèche. Où doit naître le Seigneur-Dieu I Le chasseur, un Jaurès tout rempli de malices, Clamait (ne l’entendez-vous pas IJ — Il faut organiser désormais des milices : — A Bethléem, plus de soldats ! L’aiguiseur vous prenait une sinistre gueule ; On entendait ces mots précis : [meule, — Moi, j’aiguise, dans l'ombre, un couteau sur ma Pour quand les Rois viendront le six 1 Mais c'est quand on parla de la cherté des vivres Qu’on fit maint discours véhément : — Je veux diminuer mon sac de quelques livres, Disait le meunier, chichement l La femme à la morue au meunier faisait : — Dites, L’ami, vous avez raison, té ! Et je vais en porter une des plus petites : La morue a tant augmenté l — Les choux sont hors de prix ! disait la bonne Qui marche avec un choux dessus, [femme Et je ne pense pas. citoyens, qu’on me blûme D'en offrir un moindre à Jésus ! Et l'aveugle disait — aveugle de naissance — Les regards dans l'ombre abîmés : — Aux ordres de nos chefs devant obéissance, je marcherai les yeux fermés l Rassurez-vous pourtant, braves gens que vous êtes, Quand le soir d'ouvrir fut venu Je vis toujours, avec leurs mêmes silhouettes. Les santons tels qu’on les connut 1 Ils n’avaient point de syndicats comme les nôtres, Et bien loin de nous imiter. Dans leur vieille sagesse, ils laissaient faire A Ce que je viens de raconter l [d'autres XAVIER MAUNIER....