Extrait du journal
Le Caire, 13 décembre., Alexandrie s’est révélée à nous par son phare, qui, le premier, a émergé de l’horizon; puis, par une ligne blanche de maisons, enfin par une côte basse s’étendant dans l’Ouest, langue aride de terre que jonchent seulement quelques arbres rabougris. Tout le monde est sur le pont, car on a bou clé les valises à l’avance pour pouvoir jouir du spectacle de l’entrée, qui, au fait, n’est pas banal, car le chenal qui doit nous mener •a. notre quai de débarquement est singulière ment. dessiné ; il est vrai qu’il est bien balisé. Kfc puis nous avons pris le pilote, un vieux Turc, tout habillé de noir, avec un turban blanc, que nous avons vu grimper péniblement,ballotté par le roulis, le long de la haute muraille de VHéliopalis, pendant que sa felou que se débrouillait tant bien que mal, mais plutôt mal, à l’arrière du steamer,. Ce vieux pilote et sa barque furent notre première vision d'Afrique, car Alexandrie, vue du large, n’offre pas, à ce point de vue, d’aspect particulier. Un grand port, des môles, des cheminées d’usine, des fumées des navires très nombreux, c’est le décor ordi naire ; mais ce qui nous met en joie, ce sont les petits bateaux qui nous entourent dès no tre entrée dans le bassin : yachts à moteur, vapeurs de la douane et de la santé avec leurs matelots si corrects et si propres, bar ques chargées de portefaix, de crieurs d’hô tel, vêtus de défroques innommables, mais de couleurs voyantes et qui voudraient grimper à bord; mais les matelots placés au bas de l’échelle de coupée les écartent avec énergie. Enfin, nous accostons le quai ; il est cou vert d'une foule énorme où domine lfe rouge des fez, mais où l’oni voit de tout : Européens, Arabes, fellahs, nègres, officiers anglais en rouge ou en kaki, dames aux beaux cha peaux. Tout cela remue, grouille, crie,, nous interpelle. De temps en temps, une poussée : ce sont des agents de police qui dégagent no tre échelle ; on assiste même à quelques jolis passages à tabac. Tout à coup la force publique est débordée et nous voilà, comme dans l’Africaine, en vahis par des hordes sauvages. Réunis au tour de nos bagages, nous sommes décidés à les défendre jusqu’au bout. Je ne sais com ment nous aurions pu les sauver sans M. Gavot, directeur à Marseille de l’agence Lubin. Son obligeance extrême et le solide personnel de son agence d’Alexandrie nous ont permis de quitter le navire sans encombre. Mais il fallait voir comment les sacs, les valises dis paraissaient par-dessus bord, amarrés au petit bonheur, et dégringolaient sur les têtes des gens du quai., Là. nouvelles discussions entre les hommes de l’agence Lubin et les quémandeurs.. L’un de ceux-ci. qui a vu ma carte sur une valise, m’affirme, en mauvais français, qu’il est un lecteur assidu du Petit Marseillais, et que. à ce titre, je lui dois bien un bachich. Hélas ! c’est la première fois que j’entends le terrible mot. et maintenant c’est lui qui va faire le fond de toutes nos conversations avec les naturels du pays. Quoi qu’il en soit, il y a sur le quai d’Alexandrie d’excellentes automobiles qui vous emportent rapidement vers votre hôtel. Nous avons donc, las de crier, laissé sur un chaland tous nos colis et nos malles à la...
À propos
Fondé en 1868 par Toussaint Samat, Lazare Peirron et Gustave Bourrageas, Le Petit Marseillais était le plus grand quotidien de Marseille, affichant un tirage de plus de 150 000 exemplaires en 1914. D'abord républicain radical, le journal s'avéra de plus en plus modéré au fil des ans. Dans un premier temps très local, il fut l’un des premiers journaux à publier dans la presse des récits de procès judiciaires sensationnels dès 1869, avant de s’ouvrir aux actualités internationales.
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