Extrait du journal

Chaque semaine on trouve, tantôt dans un jour nal, tantôt dans un autre, une petite note à peu près conçue en ces termes : « Nous avons le re gret d’apprendre la mort de M. X...,tué au Tonkin dans le combat de K... C’était un jeune officier du plus brillant avenir, qui, un des premiers, avait demandé à partir pour le Tonkin.M.X... était notre concitoyen ; sa mort plonge dans la désolation toute une famille honorablement connue dans no tre ville, etc. » La forme varie, mais le fond de ces nouvelles, hélas 1 ne varie pas. Ce sont les officiers les plus jeunes, les plus brillants qui tombent mortellement frappés sur les champs de bataille du Tonkin. Ils ont tenu à partir les premiers : une expédition, une guerre, c’est une bonne fortune pour les jeunes gens qui ont embrassé la carrière des armes ; on leur a parlé de pays à conquérir à la civilisation, du dra peau national à défendre contre les pirates et les brigands de l’Extrême-Orient, de frères d’armes à venger, et ils ont voulu être au premier rang. Ils ont dit, en partant, à leurs parents inquiets : 1 — Nous reviendrons ! ’ Puis, tin jour, on apprend qu’ils ne reviendront pas. Une: balle chinoise, une insolation,une fièvre typhoïde ou une dyssenlerie les a couchés pour toujours sous cette terre marécageuse qu’arrose le fleuve Rouge,- rouge hier du limon qu’il charrie, rouge aujourd’hui du sang de la France mêlé à ce limon. Ah ! les belles récoltes de riz qui germeront un jour sur cette terre du Tonkin ainsi fécondée ! Puissent-elles au moins être pour nous....