Extrait du journal
est pour le moins égal. C’est un stratégiste de premier ordre, tout le monde en con vient. merveilleux d’habileté et de finesse, souple mais tenace, qui finit toujours par avoir sa revanche. Dans l’opposition, il est incomparable ; au pouvoir, il reste égal à lui-même. Il joint à celte dextérité, à cette souplesse, qui est déjà une force, la résolu tion froide et l’énergie obstinée. Ce qu’il veut, il le veut bien ; il marche droit à son but, tournant les obstacles et les brisant au besoin; mais il aime mieux les tourner. C'est pour lui que semble avoir été fait le fameux proverbe : dulciter in modo, for mer in re ; la main de fer se gante de ve lours, mais se fait sentir. Sous la République, comme sous ja Mo narchie et l’Empire, il s’est posé, sans ja mais faiblir, en défenseur de toutes les li bertés, en adversaire de toutes les violen ces. Il n'a cessé de redire à ses amis triom phants et aux Jacobins trop épris de la bru talité du nombre, que le gouvernement doit se faire un devoir de n’épouser les pas sions d’aucun parti, car la nation n’est pas un parti et le gouvernement la représente. On l'a vu au pouvoir tel qu’il fut dans l’op position et changer de place sans changer de principes. Alors, comme aujourd’hui, il estimait que les mesures d’exception sont une marque de faiblesse. Tel il était à ses débuts, tel nous le retrouvons : libéral en tous lieux et en tous temps. Lorsqu’on étudie cette nature complexe et multiple, cette physionomie puissante, il n’est point permis, si l’on veut faire un portrait ressemblant, de négliger une seule de ses faces, de laisser un seul de ses traits dans l’ombre. Nous venons de mettre en lumière l'orateur et l’homme d’Etat, il nous faut montrer le philosophe, le professeur et le polémiste. Peu d’hommes ont autant travaillé et peu d’hommes travaillent autant que M. Jules Simon. A treize ans, il était à la fois pro fesseur et élève, payant sa pension au col lège de Vannes avec le produit de ses le çons, se levant à six heures et ne prenant un peu de repos que fort avant dans la nuit. Sa robuste vieillesse est non moins active. Dès sept heures, il s’assied à son bureau et sa plume court sans s’arrêter jusqu’à dix. Il déjeune rapidement, ouvre sa porte, et les visiteurs qui escaladent ses cinq étages trouvent un causeur plein de charme et d’esprit, qui ne se livre ni aisément ni beau coup et ne dit point ce qu’il a résolu de taire. il ne donne son amitié et sa confiance qu’à bon escient, mais il les accorde sans restriction, et son dévouement à ses amis est entier. Pour les obliger, rien ne lui coûte, et l’ingratitude humaine ne refroi dit point son zèle. Peu d’hommes ont rendu plus de services, et ont fait plus d’ingrats; il recommence, il continue, se disant qu’après tout la seule chose vraie en ce monde est d’y passer en supprimant un peu de mal et en s’efforçant d’y faire beaucoup de bien. Je ne crois pas que les ouvriers et aussi les ouvrières rencontrent jamais un défen seur plus éloquent, un conseiller plus sin cère, un ami plus dévoué. Il les soutient,les défend, mais ne les flatte point. Il rougirait de s'abaisser à la flagornerie populaire.Elle ne lui irait point, elle ne cadrerait pas avec son personnage.elle jurerait avec ses goûts, son talent, sa finesse, avec toutes les préfé rences de son esprit. Il aime le peuple et il a raison de l’aimer, car on ne fait rien de grand qu’avec lui et pour lui ; mais il doit sourire de pitié, quand il lui voit prodiguer par certains ambitieux de haut vol, dans l’intérêt d’une candidature,le plus grossier encens. Il sait trop bien, lui, le philosophe, l'homme réfléchi et studieux, qui a vécu dans l’histoire du passé, l’érudit qui peut lire Aristophane à livre ou vert, qu’on ne s’éprend pas de sérieuse passion pour les beaux yeux du charcutier Agoracrite, Il prouve ainsi à beaucoup de ses con temporains, — qui ont certainement besoin...
À propos
Fondé en 1868 par Toussaint Samat, Lazare Peirron et Gustave Bourrageas, Le Petit Marseillais était le plus grand quotidien de Marseille, affichant un tirage de plus de 150 000 exemplaires en 1914. D'abord républicain radical, le journal s'avéra de plus en plus modéré au fil des ans. Dans un premier temps très local, il fut l’un des premiers journaux à publier dans la presse des récits de procès judiciaires sensationnels dès 1869, avant de s’ouvrir aux actualités internationales.
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