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Le Petit Marseillais, 27 mars 1911

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Le Petit Marseillais
27 mars 1911


Extrait du journal

L’Imposture de Naundorff Mes lecteurs ne me sauront pas mau vais gré, je l'espère, de revenir à cette question. A la veille du jour où elle va se poser devant le Sénat, elle est d’une pressante actualité et on comprend qu’elle fasse couler des flots d’encre. Il s’agit de savoir, en effet, si ce nom des Bourbons, qui, pour tous les patriotes, quelle que soit leur opinion politique,fait partie, comme celui de Napoléon, du glo rieux patrimoine que nous a légué le passé, pourra être proclamé propriété de la descendance d’un aventurier. L'audace des Naundorffistes, l’extraor dinaire rapport fait au nom de la troi sième commission des pétitions du Sénat et où sont exposées leurs prétentions avec une assurance qui n’a d’égale que la puérilité des arguments, ont eu pour effet d’émouvoir le monde des historiens; et, sans doute, les défenseurs de cette mauvaise cause vont voir se vérifier à leurs dépens, l'exactitude du vieil axiome : « Qui veut trop prouver ne prouve rien. » Les écrivains les plus compétents et les plus qualifiés sont des cendus dans l’arène. Frédéric Masson et Lenotre, pour ne citer que ces deux-là, ont pris l'initiative de la protestation qu’appelaient tant d’erreurs et de men songes accumulés comme à plaisir par le rapporteur et par les hommes qu’il a appelés à son aide. Frédéric Masson, l’historien autorisé de tout ce qui concerne la famille des Bonaparte, a fait justice de la légende qui associe Joséphine aux tentatives qui eurent lieu pour sauver le dauphin ; il a expliqué, à la lumière d’une documenta tion inattaquable, comment et pourquoi la future impératrice n’a pu participer à ces tentatives. Quant à notre ami Leno tre, si versé dans les épisodes les plus obscurs de l'époque révolutionnaire, il a pris une à une, pour les contrôler, les affirmations du rapport et il en a démon tré la fausseté, en y opposant des docu ments, des dates, les paroles et les actes de Naundorff lui-même. Je me serais donc gardé d’intervenir de nouveau dans le débat, si, d’une part, le rapport et ses annexes ne me mettaient en cause du commencement à la fin et si,d’autre part, îl ne me semblait utile de préciser les preuves fournies par mon brillant con frère et d’enregistrer les résultats que nous lui devons. N’ayant pas d’opinion bien déterminée sur la question de savoir si le dauphin est sorti du Temple et disposé même à croire qu’il en est sorti, il se contente d’observer que l’évasion,laquelle, d’après le rapporteur, serait « scientifiquement prouvée », ne l'est nullement et que, à cet égard, le doute existe après le rap port, aussi fort et aussi fondé qu’il l’était avant. Ceci posé, il se demande s’il y a identité entre Naundorff et l’enfant royal. C’est ici que sa démonstration devient véritablement lumineuse. Il rappelle que, devenu veuf en 1818, Naundorff, qui était alors à Spandau, où il exerçait la profession d'horloger, se remaria le 18 novembre de la même année avec la fille d’un marchand de pipes, âgée de seize ans. Puis, il étudie l’acte de mariage dont la teneur nous est connue. Or, dans cet acte, signé de l’épo que, celui-ci déclare qu’il a 43 ans. De cette déclaration, il résulte qu’il avait dix ans de plus que le fils de Louis XVI, qui était né en 1785. Sans doute, plus tard, regrettant de l’avoir faite, il a prétendu qu’on lui avait imposé au moment de son mariage « une personnalité imaginaire »: On ne s’explique guère ce que cela veut dire, tandis que ce qui est parfaitement clair, c'est la pièce légale où,de sa plume, il a authentiqué son âge de quarantetrois ans. Pourquoi Va-t-il signée s’il n'avait pas cet âge ? Et s’il l’avait, pour quoi l’a-t-il nié depuis ? A qui fera-t-on croire que, en se mariant, il s’est laissé extorquer sa signature ? N’est-il pas plus logique de penser que, à ce moment, il ne...

À propos

Fondé en 1868 par Toussaint Samat, Lazare Peirron et Gustave Bourrageas, Le Petit Marseillais était le plus grand quotidien de Marseille, affichant un tirage de plus de 150 000 exemplaires en 1914. D'abord républicain radical, le journal s'avéra de plus en plus modéré au fil des ans. Dans un premier temps très local, il fut l’un des premiers journaux à publier dans la presse des récits de procès judiciaires sensationnels dès 1869, avant de s’ouvrir aux actualités internationales.

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