Extrait du journal
la Tourrette, j’ai confiance. Vous, les journalistes, d’abord, vous devez bien à celui qui a été votre grand « patron » de faire campagne pour sa mémoire. Et puis, je suis assuré qu’il y a, en France, plus de personnes qu’on ne croit disposées à rendre hommage à une physionomie aussi attachante d’homme de bien que celle de mon Renaudot. J’y allais, il y a deux ans, de mon ar ticle, comme tout le monde, quand la souscription fut ouverte ; mais je ne comp tais guère sur sa réussite, j’avais vu la maquette de la statue, œuvre d’Alfred Boucher, et je me disais qu’un pareil mo nument ferait fort bien, sans doute, soit près de l’endroit où avaient.au xvn* siècle installés les bureaux primitifs de la Ga zette ; je convenais qu’il était étrange que celui qui avait donné son essor à la presse, ce puissant instrument de bonnes choses, quoi qu’on dise, n’eût pas la glo rification, du marbre ou du bronze, qu’on avait donnée à certains, dont l’œuvre fut moins grande; mais je craignais que nous en fussions tous pour nos plaidoyers et nos appels. Eh bien ! j’ai dû constater, sans le moindre regret, que Je me trompais. Il y a, en effet, dans notre pays, plus de gens qu’on ne pense toujours disposés à sou tenir une idée juste. C’était le docteur Gille de la Tourette, ayant su d’ailleurs intéresser à son projet certaines person nalités dont l’appui devait être décisif, qui avait raison. Et voici, en effet, que, dans quelques Jours, on va l’inaugurer, ce monument, et que ce sera le ministre de l’intérieur qui le recevra officiellement du Comité. Théophraste Renaudot aura attendu deux cent quarante ans l’expression de la gra titude publique, mais son ombre aura, enfin, ses hommages. Si MM. Claretie et Vacquerie parlent du fondateur du jour nalisme français, le préfet de la Seine dira les titres du philanthrope à la recon naissance de son pays ; et M. Brouardel saluera le précurseur de la médecine rationnelle luttant contre l’empirisme. Quant au docteur Gille de la Tourette, qui aurait bien, lui aussi, le droit de prendre la parole, car il s’est assez re mué pour « son » grand homme, il jouira du résultat de ses efforts. Il a obtenu ce qu’il voulait pour Renaudot, dont, en sa qualité de Poitevin, il est le compatriote, et c’est tout ce qu’il désirait. Il lui suffit d’avoir prouvé comment, avec de la ténacité, on arrive à tout. il mourut la plume à la main, ce gazetier, ancêtre de tous les journalistes. Il succomba le 25 octobre 1653. La veille, il rédigeait encore son article, où, vieux patriote qu’il était, il prédisait (et Turenne allait se charger de réaliser sa prophétie) la défaite des ennemis de la France. Ce qui est vraiment curieux, c’est que, même dans la composition matérielle d’un journal, il avait tout prévu, tout ima giné. Ainsi, dans les premiers numéros de la Gazette, très petits de format, quand il avait une grosse nouvelle à communi quer au public, usait-il de ce que nous appelons, dans notre argot de métier « le titre en bande ». Mais la bonne foi de Renaudot était touchante. C’est une tradition que nos journaux n’ont pas toujours conservée ! « Guère de gens, imprimait-il dansun.de ses premiers numéros, ne remarquent la différence qui est entre l’histoire et la gazette : c’est ce qui m’oblige de vous dire que l’histoire est le récit des choses advenues, la gazette seulement le bruit qui en court. La première est tenue de dire toujours la vérité, la seconde fait assez si elle empêche de mentir... ». Et ailleurs : « En une seule chose ne céderai-je à personne : en la recherche de la vérité, de laquelle, néanmoins, je ne me fais pas garant, étant malaisé qu’entre cinq cents nouvelles écrites à la hâte, d’un climat à l’autre, il n’en échappe quel qu'une à nos correspondants qui mérite d’être corrigée par son père le Temps; mais encore, se trouvera-t-il, peut-être,...
À propos
Fondé en 1868 par Toussaint Samat, Lazare Peirron et Gustave Bourrageas, Le Petit Marseillais était le plus grand quotidien de Marseille, affichant un tirage de plus de 150 000 exemplaires en 1914. D'abord républicain radical, le journal s'avéra de plus en plus modéré au fil des ans. Dans un premier temps très local, il fut l’un des premiers journaux à publier dans la presse des récits de procès judiciaires sensationnels dès 1869, avant de s’ouvrir aux actualités internationales.
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