Extrait du journal
Paris, 27 septembre. La formidable bataille qui se livre, de puis près de quinze jours, sur les terrains compris entre la Somme et l’Aisne n’a pas encore amené de résultat décisif. Je sais des gens qui en éprouvent un certain émoi. S’ils voulaient bien considérer qu’il s’agit ici, comme je crois l’avoir déjà dit, d’une véritable guerre de siège, ils comprendraient tout de suite que la solution ne peut s’obtenir qu’après de très longs efforts. Les Allemands, battus sur la Marne, ont pris le parti, qui a dû singulièrement coûter à leur présomptueuse assurance, de se mettre sur la défensive. Ils ont ren contré une position très forte, dont la va leur a été encore augmentée par des tra vaux de campagne, et, renonçant, par obligation, à l’effet de terrorisation qu’ils avaient escompté,ils se sont terrés, atten dant l’attaque. Celle-ci est venue plus vite peut-être qu’ils ne croyaient ; mais elle est difficile et lente. Quand il s’agit de se battre sur un front de 170 kilomètres, partout hérissé de défenses, l’assaillant est bien obligé de procéder par ordre, de choisir $es points d’attaque et d’user de prudence, sous peine de s’exposer à des pertes énor mes, dont l’effet matériel et moral pour rait être désastreux. Les Allemands, trop peu ménagers de leurs hommes", avaient adopté, au moins au début, le système des ‘ attaques en masse lancées comme des coups de bé lier. Elles ne leur ont pas réussi, et ils semblent y avoir renoncé. Nous connaissons, heureusement, une méthode différente,, plus raisonnable, plus humaine et qui consiste à investir peu à peu l’adversaire, à l’user sur tout le front par des combats incessants, mais nourris tout juste ce qu’il faut ; puis, quand l’épuisement commence à se faire sentir dans ses rangs, à l’enfoncer quel que part, au moyen d’une manœuvre ap propriée. Je ne nie pas que-cette tactique ne soit parfois plus lente ; mais elle est beau coup moins coûteuse et elle aboutit tôt ou tard à des résultats certains. Armons-nous donc de patience et attendons l’événement qui ne peut man quer de se produire. Tout fait espérer qu’il sera en notre faveur. Surtout, fai sons attention que nos alliés les Russes commencent à faire sentir leur action sur la frontière orientale de l’empire germa nique. Ils ont pris Lemberg, Jaroslaw et investi Przemisl,qu’ils menacent à la fois par le Nord et par le Sud. Cette dernière place prise — et cela ne saurait tarder, étant donné le désarroi des Autrichiens, — la route de Cracovie sera ouverte,c’està-dire celle qui permet de tourner les dé fenses de l’Oder, unique protection de la capitale du kaiser. Croit-on que l’état-major allemand puisse longtemps encore se désintéresser d’un pareil danger et proroger beaucoup l’échéance d’une volte-face qui devien drait inutile si elle s’opérait trop tard ? Je conclus de tout ceci que la situation militaire, prise dans son ensemble, doit être considérée comme favorable aux ar mées alliées. Je n’ignore pas que la poussée de l’en nemi sur les Hauts de la Meuse a causé quelque inquiétude. Des troupes venues de Metz ont avancé jusqu’à Saint-Mihiel et même essayé de franchir la rivière. Elles opèrent dans un terrain tellement difficile et tellement exposé au feu des forts de la frontière, dont aucun n’a en core été pris, que leurs progrès ne parais sent pas pouvoir être très rapides. Au surplus, les défenses mobiles de Nancy et de Tout se chargeront de les arrêter avant qu’elles aient pu tendre la main à l’armée du kronprinz, qui, coincée entre ’’ l’Argonne et la Meuse, a toutes les peines du monde à coopérer de quelque façon que ce soit à l’action engagée d’autre, part. • En somme, les Allemands se sont li vrés jusqu’ici à ce jeu de navette entre leurs divers fronts de bataille. Tout per met de croire qu’il aura bientôt une fin. L^Colonel ROUSSET....
À propos
Fondé en 1868 par Toussaint Samat, Lazare Peirron et Gustave Bourrageas, Le Petit Marseillais était le plus grand quotidien de Marseille, affichant un tirage de plus de 150 000 exemplaires en 1914. D'abord républicain radical, le journal s'avéra de plus en plus modéré au fil des ans. Dans un premier temps très local, il fut l’un des premiers journaux à publier dans la presse des récits de procès judiciaires sensationnels dès 1869, avant de s’ouvrir aux actualités internationales.
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