Extrait du journal
La Chambre renferme un certain nom bre d’agités toujours en ébullition et en fièvre qui veulent tout démolir en une minute et tout rebâtir en un clin d’œil. Leur système est celui de la table rase et l’impérieux besoin qu’ils ressentent de déblayer le terrain pour le couvrir en suite de constructions nouvelles imprime à leur zèle un caractère maladif. Ils croient toujours avoir perdu leur journée s’il n’ont mis le feu à quelque mine. A les entendre, le pays réclame ceci, exige cela, éprouve l’irrésistible envie de voir s’accomplir le divorce entre l’Eglise et l’Etat et va s’insurger si l’on ne revise sur l’heure la Constitution pour enlever au Sénat son droit de contrôle sur le budget; vite l’impôt sur le revenu ou les contribuables se mettront en grève. Tout ce qui germe dans leurs cerveaux nous est invariablement présenté comme l’ex pression exacte de la volonté populaire et s’ils méditent de tout bouleverser, tenez pour certain que la France le leur ordonne. En réalité, elle ne demande pas tant de choses et serait contente à moins ; malheureusement,on ne lui donne presque jamais ce dont elle a besoin et on lui offre ce dont elle se soucie peu. Sauf ce grain de mil qui ferait si bien son aifaire et qu’elle n’obtient pas, on lui offre, on lui impose un tas de réformes dont les meilleures ne lui sont qu’inutiles. Les Français sont infiniment plus sages et modestes dans leurs vœux que les ré formateurs ne semblent le croire ; ils ne demandent pas la lune. Une Chambre qui leur ferait de bonnes finances, lui donne rait la paix â l’intérieur, pratiquerait une politique à la fois ferme et libérale serait pour eux la meilleure des Assemblées. Si elle joignait à cela une ou deux bonnes lois, une ou deux réformes utiles, elle comblerait et au delà leurs espérances. Ils ne souhaitent pas qu’on fasse grand ; l’indispensable leur suffirait. Ils ne peuvent l’obtenir, car ces hom mes supérieurs ne s’abaissent point à ces réalités subalternes. Ils ne sont épris que des formules pompeuses et vides et pourvu qu’un projet fournisse matière â discours bien sonore, ayant un caractère électoral, une portée électorale, le reste leur im porte peu. Us vivent de beau langage, tandis que les électeurs aimeraient mieux vivre de bonne soupe. De là, tant de projets qui dorment dans les archives et dont quelques-uns feraient admirablement notre affaire ; les Cham bres se les lèguent sans qu’aucune se soucie de les discuter car il faudrait de la compétence, un effort soutenu et ils ne fournissent pas matière à ces déclama tions qui séduisent parfois les foules. De là, aussi, tant de séances perdues à dis cuter ces réclames électorales rédigées en forme de projet de loi qui ne servent à rien, quand elles ne servent point à cul buter un ministère. Un projet, de réforme, s’il est bon, a les plus sérieuses chances de n’êtrc jamais discuté ; s’il est inutile ou dangereux, il aura les honneurs de la tribune et parfois les honneurs du vote, on lui aplanira la route, on lui accordera l’urgence et les commissions feront preuve d’un grand zèle. Ce sont à peu près les seuls qui aboutissent. Quant aux réformes utiles et désirées par le pays, elles attendent sous l’orme ou lorsque, par hasard, une bonne fée les tire de cette ombre aussi funeste que celle du mancenillier, un mauvais génie les rend aussitôt stériles. On se souvient peutêtre de cette fameuse loi sur la quotité et la répartition que la Chambre vota, mais que les conseils municipaux ne purent appliquer. La justice nous oblige à reconnaître que le Parlement ne fut pas toujours le seul ni le plus grand coupable. U a le tort, sans doute, de ne pas barrer réso lument le chemin, en toute occasion, aux prétendus réformateurs qui ne sont, la plupart du temps, que des brouillons ; mais une Chambre ne résiste efficace ment que si les ministres lui donnent...
À propos
Fondé en 1868 par Toussaint Samat, Lazare Peirron et Gustave Bourrageas, Le Petit Marseillais était le plus grand quotidien de Marseille, affichant un tirage de plus de 150 000 exemplaires en 1914. D'abord républicain radical, le journal s'avéra de plus en plus modéré au fil des ans. Dans un premier temps très local, il fut l’un des premiers journaux à publier dans la presse des récits de procès judiciaires sensationnels dès 1869, avant de s’ouvrir aux actualités internationales.
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