Extrait du journal

Un congrès national de la natalité vient de se tenir à Rennes. Des discours très éloquents ont été prononcés. Des rap ports très judicieux ont été lus. Des voeux très sages ont été votés. Seulement, les congrès ne font pas d'enfants et il y a tout lieu de croire que, malgré les telles résolutions du congrès de Rennes, la crise de la natalité persistera et s'aggra vera chez nous. Cette crise, en effet, ne peut pas ne pas persister, ne pas s'aggraver. Cela pour deux raisons essentielles et brutales: parce que la crise du logement, chez nous, persiste et s'aggrave, parce que la crise de la vie chère, elle aussi, persiste et s'aggrave. Les congrès n'y feront rien. Les dis cours n'y feront rien. Les plus académi ques conférenciers, les plus nobles socio logues y perdront leur belle vieillesse. Tous les efforts seront vains. Toutes les lois seront stériles. Toutes les ligues seront paralytiques, tant que dureront et grandiront les deux crises conjuguées du logement et du bifteck. Des discours, de fiers discours sur la dépopulation, cela ne prend pas de place, cela ne coûte pas cher. Mais, les enfants, cela prend de la place, cela coûte cher. La moitié de la population de nos grandes villes est condamnée au taudis ou à l'hôtel meublé à l'un et à l'autre, souvent. Foyers de misère, foyers d'ennui, foyers de tuberculose, oui ! Mais foyer de la famille, non ! La moitié de la popu lation de nos grandes villes est condam née à vivre sans foyer. Les jeunes ména ges n'arrivent pas à trouver un abri et des congressistes éperdus les exhortent à avoir beaucoup d'enfants ! Pour les met tre où ? Dans l'armoire à glace ? C'est comme si on allait dire au prisonnier enfermé dans sa cellule : a Semez, mon ami, semez et labourez. Donnez-nous du beau blé et de belles moissons. » Beaucoup de jeunes ménages, qui n'ont pas d'enfant, arrivent tout juste à vivre. C'est qu'il se confirme que la vie est très chère et que les ressources des Français moyens sont de plus en plus médiocres. Souvent, dans un ménage, il faut que la femme travaille elle-même, s'en aille, dès le matin, vers l'usine, le magasin ou le bureau. Un enfant survient ? La maman ne_ peut plus travailler. Les charges du ménage sont doublées. Les revenus du ménage se trouvent réduits de moitié. Encouragements contestables à la repo pulation... On voit trop de familles nombreuses sans logis pour qu'il n'y ait pas beaucoup trop de ménages sans enfants. Il y a une crise de la dépopulation, parce qu'il y a une crise de la repopula tion, parce que les braves gens de France qui ont beaucoup d'enfants se trouvent, chaque jour, aux prises avec de trop cruelles difficultés. Maurice PKAX....