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Le Temps, 12 octobre 1904

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Le Temps
12 octobre 1904


Extrait du journal

colat, et quand tu auras, déjeuné bien tranquil lement, tu te reposeras un peu, ou sur le divan, - ici, ou dans ta chambre, si tu préfères. Mais pendant que Paulette versait le chocolat dans sa tasse, Blanche; passant une fois encore son mouchoir sur ses yeux mouillés, lui apprit la lugubre nouvelle. — Paulette, Germaine est mortel — Oh I... - Et Paulette aussitôt, la main tremblante, le regard brouillé de larmes; dut déposer sur la table le pot en porcelaine. ■—Et, il faut que je te dise tout de suite — parce que nous n’en parlerons pas davantage, n’est-ce pas?—il faut que je te dise pourquoi. Germaine m’a demandée cette nuit... c’était pour me jurer qu’au moment de son mariage elle ne savait rien I tu entends, Paulette, elle ne savait rien l Se repentant déjà d’avoir calomnié la morte, Paulette répliqua fièrement :• - — Mais, au fond, je l’avais toujours cru ! Pau vre Germaine ! Et aussitôt afin de ne pas laisser perdre quel ques miettes de ses justes rancunes, elle distri bua équitablement la part qu’elie réservait jadis à Germaine entre Bernard et Mme Dutilleul : lui, qui avait feint de vendre avec son nom, un cœur qui ne lui appartenait plus ; elle qui ache tait un mari à sa fille en n’ignorant pas les dé boires que la malheureuse tirerait d'une pareille acquisition. D’ailleurs, contre son ordinaire, Paulette pro céda presque en silence à cet acte de haute jus tice, tout en beurrant le petit pain de sa sœur qu’elle exhortait à manger, et en s’installant pour déjeuner elle-même. Semblable aux petits oiseaux qui ont très faim à l’heure du réveil, Paulette, quoique es suyant de temps à autre une larme, se coupait encore une quatrième ou cinquième tartine dans une grosse miche qu'elle substituait pour elle au trop petit pain de gruau, et Blanche, ayant avalé son chocolat, s’était à demi-étendue sur le divan — la clientèle ne donnait guère qu’après les premières visites des médecins. Soudain, dans le couloir qui communiquait avec l’entrée « bourgeoise » de la maison, on entendit un bruit singulier, semblable au roulement très doux d’un petit véhicule....

À propos

Le Temps, nommé en référence au célèbre Times anglais, fut fondé en 1861 par le journaliste Auguste Neffzer ; il en fit le grand organe libéral français. Il se distingue des autres publications par son grand format et son prix, trois fois plus élevé que les autres quotidiens populaires. Son tirage est bien inférieur à son audience, considérable, en particulier auprès des élites politiques et financières.

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