Extrait du journal
Mon histoire, messieurs les juges, sera brève. Voici : les vidangeurs s'étaient tous mis en grève; Le métier, nous ne l'avions pas en bonne odeur ; On prétend que ça porte bonheur, ah ! malheur t Nous avions décidé qu'un conciliabule De nuit,— dam! notre état,cela rend noctambule— Aurait lieu. Nous voulions embêter les patrons Qui s'engraissent par trop des sueurs de nos fronts. C'est vraiment dur de vivre,allez! quoiqu'on en dise, Toujours en tête-à-tête avec la marchandise Qui vient de la nature et dont on fait l'engrais.] On parle du progrès ? C'est propre, le progrès ! Que nous importe à nous qu'on ait le téléphone î Nos affaires n'ont pas marché depuis Cambronne. Donc on se réunit et l'on parla tretous Avec pompe; la pompe on connaît ça, chez nous. On traita longuement la dureté des maîtres. (On leur avait écrit en vain jusqu'à cinq lettres, Et pas un d'eux n'avait répondu: M...ince, alors !) Oh ! les bourgeois ! les voir circuler, ces mylords, Dans leurs coupés, narguant la brise glaciale, Nous qui ne voyageons que sur l'impériale ! Passons!... C'était à moi de parler, j'ai parlé. Tous ces discours m'avaient carrément emballé, Et je fus éloquent, poétisantla grève, (Après ? Monsieur Zola n'a-t-il pas fait le Rêve ?) Bref, j'en dis tant et tant qu'à l'unanimité On m'élut Président de la Société. > Et pendant un instant, ivresse sans mélange, Je respirai l'encens du triomphe, oh ! ça change! Le lendemain matin, mon patron m'appela, Et me dit ; «,G'est très mal, ce que vous faites là ! Grâce à vous je vais voir ruiner mon commerce " Et mettre, d'ici peu, tous mes tonneaux en perce.„ Renversant ma vapeur, détruisant mes siphons. Je n'aurai d'autre espoir que de manger mon fonds !» «—Eh bien ! mange-le donc tout de suite ! » lui dis-je. Et, saisi tout à coup d'un horrible vertige, Dans un large baril qui fumait sous le vent Je lançai mon patron, bing ! la tête en avant. Maintenant, vous savez la mort de la victime. Donnez, à votre choix, une peine à mon crime, Le bagne ou la prison, je n'en ai nul souci, Et si vous m'envoyez loin de Panlin, merci ! GA VROC1IE....
À propos
Fondé en 1884 par Aurélien Scholl et Valentin Simond, L’Écho de Paris était un grand quotidien catholique et conservateur. Il était sous la coupe financière du célèbre homme d'affaires Edmond Blanc, propriétaire notamment de plusieurs casinos et hôtels de luxe à Monte-Carlo.
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