Extrait du journal

XI. — N* 20. — Le printemps. (Suite.) Elle .s’approcha du dessin qui naissait sous les doigts de la jeune fille, et lui dit : — Pardonnez ma curiosité. Antonia quitta son papier et le mit aux mains de la dame inconnue, afin quelle le vit mieux. La dame prit le dessin, mais ce fut la jeune fille qu’elle regarda, et elle dit alors : — Gaston avait raison, votre ressemblance avec elle est frappante. Antonia la regarda très surprise. — Vous travaillez pour vivre? demanda la dame avec intérêt, et vous vivez seule ? — Je ne vis pas seule, répondit Antonia ; j’ai autour de moi ma famille que j’aide à vivre avec mon travail. Depuis qu’elle avait donné asile à ses amies, Antonia était convenue avec elles de se dire ainsi en famille ; famille de cœur si l’on veut, mais qui n’en était que plus intime. Toutes ces jeunes filles avaient été à même de remarquer que la vie isolée éveillait des projets et des soup çons ; elles s’appuyaient ainsi iss unes contre les autres pour se soutenir moralement contre le mépris, comme elles se soutenaient contre la misère, La dame inconnue resta un moment silencieuse, exami nant Antonia avec tristesse, puis elle dit : — Voulez-vous me permetlse d’acheter ce dessin ? Et, sans donner le temps de lui répondre, elle tira un pëtit...