Extrait du journal

l'endurance, la fertilité d'invention du futur escroc. domine le héros de Beaumarchais, il exerce mille et un métiers; et, pour commencer, des métiers très humbles. Tour à tour, camelot, commis voyageur, chanteur de chansonnettes, fabricant de fouets, créateur d'« attractions » à l'Exposition universelle, doué d'une éloquence naturelle, d'une verve intarissable, il amuse la foule par ses boniments, puis il fonde un journal. Les maigres profits qu'il en retire ne contentent point son appétit. Il se tourne du côté du commerce. Sa rare Imaginative lui suggère une idée géniale; c'est d'acheter d'énormes quantités de soie, de les revendre à long terme et de partager les bénéfices avec le comptoir qui lui a avancé les fonds. Cette spéculation réussit ; les dons du courtier, son entregent, sa faconde persuasive le servent à merveille. Il empaume les fabricants de tissus, les directeurs des grands magasins, les banquiers... On ne jure que par lui. Il est l'homme indispensable, providentiel. Ses premières opérations, étroitement surveillées, sont correctes. Bientôt, la surveillance se relâche. Comment se méfier de ce joyeux et franc compagnon? Ses associés leussent cru lui faire injure. Est-il nécessaire, d'ailleurs, qu'il recoure â la fraude, puisqu'il peut s'enrichir honnêtement, normalement? On ne met pas en doute sa probité. On lui permet d'agir à sa guise. Alors, il cède à la tentation; du vol facile. D'une erreur initiale découlent d'innombrables défaillances. Le Parisien brillant, l'habitué de l'Opéra, le membre décoré de l'Aéro-Club, le confident des ministres, se livre en cachette, quand aucun oeil ne l'épie, aux louches pratiques des caissiers infidèles; il truque sa comptabilité, appose de fausses signatures sur des reçus apocryphes. Les trous se multiplient. Le gouffre se creuse....