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L’Ouest-Éclair, 19 mai 1918

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L’Ouest-Éclair
19 mai 1918


Extrait du journal

Pendant les deux ou trois semaines qui suivirent le déclenchement de la dernière offensive allemande, cette mauvaise polémique avait cessé. L'angoisse du péril avait fait taire les agitas et les grincheux que le socialisme et le syndicalisme ont commis l'imprudence de se donner pour chefs. Quand Amiens et Paris étaient en danger, il eût été odieux, mais en même temps tout à fait grotesque, de tenir à M. Clemenceau et à M. Lloyd George le langage suivant a Jurez au socialisme international, jurez à l'Allemagne que vous n'abuserez pas de la victoire et que vous n'imposerez au vaincu que des conditions de paix modérées et raisonnables ». Les chefs du parti socialiste et les fonctionnaires de la C. G. T. se sont bien rendu compte qu'une clameur de haro eût accueilli cette sommation injurieuse et sotte. Et ils ont eu la pudeur de se taire. Mais l'ennemi ayant été contenu et une accalmie relative s'étant produite sur le front de bataille, il n'en a pas fallu davantage pour qu'ils se dressassent de nouveau contre les exigences de la discipline nationale. Je n'aurai garde de juger leurs intentions, mais je puis bien dire que leur attitude est assez déplaisante et que c'est un patriotisme d'une espèce très particulière que oelai qui ne se manifeste qu'aux heures de crise ou de malheur. Je suis sûr que si la France était, par impossible, frappée à mort, ou maesieurs se tiendraient très bien à aon enterrement et que leurs larmes se joindraient aux nôtres. Mais je regredte que la pensée d'une France victorieuse et d'une Allemagne défaite, qui nous inspire à nous, quand nous y arrêtons notre esprit, un sentiment de joie si vif, ne soit pour eux qu'une raison d'inquiétude et presque de mécontentement. Ils semblent, comme je l'observais naguère, avoir peur de la victoire. Si l'on peut ainsi parler, la victoire leur est suspecte. Ils y voient, diraient les théologiens, comme une CI occasion de péché ». Leur imagination se représente l'Allemagne à notre merci. Malheureuse Allemagne Si nous allions profiter par hasard de l'état où nos armées l'ont réduite, pour la maltraiter et mettre des entraves à son « libre développement 1 » Cette préoccupation les lancine. Il faut, disent-ils, empêcher cet abus de la force. Et pour l'empêcher, il faut obliger la France et ses alliés à dire, une fois pour toutes, quelles sont leurs conditions de paix ou, ce qui revient au même, leurs CI buts de guerre ». La proclamation de ces buts de guerre équivaudra à un serment solennel qui liera l'Entente vis-à-vis de l'Allemagne (l'Allemagne, d'ailleurs, n'étant point liée vis-à-vis de l'Entente) et qui permettra au vaincu de se sauver d'un trop grand désastre en invoquant 'a parole même de son vainqueur. En somme, nos politiciens d'extrême-gauche supposent qu'à une heure donnée, l'Allemagne se trouvera dans la situation d'un bandit que l'on a fini par désarmer et à quil'on demande compte de ses attentats. Et ils veulent bien que ce bandit soit jugé, mais ils songent généreusement à ses moyens de défense et, avant même que soit close la série de ses crimes, ils exigent du tribunal à qui il appartiendra de statuer sur son cas, la promesse de ne pas pousser trop loin la sévérité 1....

À propos

Fondé en 1899 à Rennes, L’Ouest-Éclair était un quotidien régional français dont l’influence prospérait sur toute la région Bretagne, jusqu’en Vendée. Il sera remplacé par Ouest-France à la Libération, en 1944.

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