Extrait du journal

Ne nous lassons donc pas de rendre hommage aux défenseurs de Verdun, à l'héroïsme incomparable des troupes, à la science, au sang-froid, à la haute valeur intellectuelle et morale des chefs. Ne nous lassons pas de redire qu'à Verdun comme sur la Marne, l'Europe a été sauvée par la France et qu'en conséquence, rien n'est plus mérité que le prestige dont elle jouit, à cette heure, dans les conseils de la coalition, comme aussi rien ne sera pUte légitime que l'affirmat.ion haute et nette de ses aspirations et de ses droits à l'heure de la victoire commune. Pendant que Verdun retenait la force allemande, l'armée britannique se constituait, l'armée russe se reformait, les usines de guerre des pays alliées. produisaient sans relâche des canons et des munitions. Derrière ces poitrines humaines sur lesquelles pleuvait la mitraille, nos gouvernements et nos états-majors coordonnaient leurs projets, concertaient leurs initiatives, organisaieht leur effort diplomatique et militaire. Le 27 mars 1916, à la Conférence de Paris, M. Aristide Briand avait. déclaré « Il faut, quand nous sortirons d'ici, qu'il n'y ait désormais pour les Alliés qu'une seule cause, servie par une seule armée, combattant sur un seul front, contre un seul ennemi, sous une direction unique. » C'était la formule de la victoire. Mais pour pouvoir la mettre à exécution, il fallait du temps. Ce temps, c'est la résistance de Verdun qui I a donné. Pendant qu'à l'arrière, des hommes prompts à s'agiter, des esprits inquiets et remuants, confiants en eux-mêmes et méfiants des autres, essayaient d'atteindre l'autorité du gouvernement et de substituer les fantaisies de leur incompétence aux decisions des pouvoirs réguliers, nos chefs, tout à leur besogne, supportaient ces critiques injustes avec le même calme que les assauts de l'ennemi. Ils savaient ce qu'i's avaient à faire tenir, et ils savaient aussi que cette consigne héroïque n'était pas audessus de la vaillance de nos soldats. CYnfiance du commandement dans la troupe, confiance du gouvernement dans le eommandement, confiance de la nation dans le gouvernement cette triple confiance dont la France n'a pas cessé jusqu'ici de donner l'exemple, était-elle déraisonnable ?. Les événements répondent. Nous entrons dans le septième mois de la défense de Verdun, et non seulement le résultat cherché par l'Allemagne n'a pas été obtenu, mais celui que nous voulions obtenir se manifeste avec assez de clarté pour qu'il soit désormais impossible d'en contester le bienfait. L'unité d'action sur l'unité de front n'est plus une formule elle est devenue et elle restera une réalité....