L'élection présidentielle de 1906 (1/2)
En 1906, le président de la République Émile Loubet décide de ne pas briguer de second mandat, convaincu d'avoir fait "tous les efforts pour le bien de son pays".
Fin 1905, alors que l'élection présidentielle au suffrage indirect doit se tenir quelques semaines plus tard, Émile Loubet fait part de sa décision de renoncer à briguer un second mandat.
Le supplément du dimanche du Petit Journal de décembre consacre une partie de son édition aux préparatifs de l'élection, mais aussi au départ de l'ancien locataire de l'Élysée. Émile Loubet, humble et affable, est respecté pour avoir su gérer l'affaire Dreyfus, la première crise du Maroc et la séparation de l'Église et de l'État.
"Je quitterai l'Élysée le 18 février prochain, à cinq heures du soir, a dit M. Loubet...
Assurément, ce ne sera pas sans quelque regret, car l'Élysée est un séjour fort agréable et bien digne du nom qu'il porte. [...]
Cette superbe demeure, pleine de souvenirs historiques, ce palais dont les jardins magnifiques s'étendent jusqu'aux Champs-Élysées, va prochainement changer de maitre. M. Loubet l'abandonnera de son plein gré. « Je ne regretterai rien, a-t-il dit ; je n'aurai aucune amertume. J'aurai seulement la satisfaction d'avoir rempli ma tâche, d'avoir fait tous mes efforts pour le bien de mon pays ; de m'être consciencieusement acquitté de la mission qui m'avait été confiée. Et puis, aussi, une grande joie, une double joie : celle de quitter les honneurs qui me pesaient et de les quitter de telle manière qu'en les quittant, c'est encore un devoir que je remplis pour me conformer à l'esprit de la Constitution... »
Ainsi, tandis que, le 18 février prochain, son successeur entrera dans le palais illustre, lui, le président sortant, redeviendra simple citoyen. Et dans l'intimité familiale, il se réjouira de pouvoir, suivant sa propre expression, « goûter, pour la première fois depuis sept ans, le charme d'une bonne pipe, fumée au coin du feu, sans le souci d'une crise ministérielle, d'une séance orageuse, ou de complications diplomatiques. »"
Quelques semaines avant l'élection, "dans tous les milieux politiques on commence à s'agiter en vue du Congrès qui aura lieu au mois de février prochain pour la nomination du Président de la République", note Le Petit Journal.
Il faut dire que l'élection présente plusieurs originalités : pour la première fois, une élection présidentielle oppose les présidents respectifs des deux Chambres du parlement, le modéré Armand Fallières président du Sénat, appuyé par la majorité parlementaire du Bloc des gauches, et le radical dissident Paul Doumer, président de la Chambre des députés, soutenu par une partie du centre et l'opposition de droite. C'est donc paradoxalement un modéré qui est investi par la gauche et qui affronte un radical soutenu par la droite...
Retrouvez le second volet de notre série consacrée à l'élection présidentielle de 1906.