Écho de presse

L'invisible appel du 18 juin

le 17/06/2024 par Pierre Ancery
le 25/04/2017 par Pierre Ancery - modifié le 17/06/2024
A tous les Français, appel du général de Gaulle ; 18 juin 1940 - source Gallica BnF

Le discours radiophonique prononcé par de Gaulle en juin 1940 n'eut guère d'écho dans la presse hexagonale, déjà globalement dévouée au maréchal Pétain.

Le 18 juin 1940, la voix d'un général à peu près inconnu en France résonne sur les ondes de la BBC. Dans cette allocution, Charles de Gaulle, qui a rejoint la capitale britannique la veille, lance un appel aux armes et incite à ne pas cesser le combat contre l'Allemagne nazie. "Quoi qu'il arrive, dit-il, la flamme de la résistance française ne doit pas s'éteindre et ne s'éteindra pas".

 

Sur le moment, l'appel n'est entendu que par très peu de Français. La presse du lendemain en fait à peine mention. Le Temps publie toutefois un message du ministère de l'Intérieur à Bordeaux désavouant son auteur :

 

"Le général de Gaulle, qui a pris la parole à la radio, à Londres, ne fait plus partie du gouvernement et n'a aucune qualité pour faire des communications au public. Il a été rappelé de Londres et a reçu l'ordre de rentrer en France et de se tenir aux ordres de ses chefs. Ses déclarations doivent être regardées comme non avenues."

 

Si le message précise que De Gaulle "ne fait plus partie du gouvernement", c'est qu'il a été sous-secrétaire d’État à la Guerre et à la Défense nationale du gouvernement Reynaud pendant 10 jours, du 6 au 16 juin.

 

Le 22, l'appel du général exilé est repris à la BBC. Le 25, trois jours après la signature de l'Armistice, Le Matin annonce que de Gaulle a été destitué par Pétain, désormais président du Conseil :

 

"[…] le général de Gaulle qui s'était réfugié en Angleterre et qui à plusieurs reprises avait parlé à la radio anglaise pour inviter le peuple français à continuer la lutte, malgré que la situation sur le terrain militaire était désespérée, a été relevé de ses fonctions pour insoumission et pour tentative de révolte contre son gouvernement."

 

Dans son édition du soir, le quotidien ajoute que "le général destitué de Gaulle continue sa campagne factieuse par l'entremise de la radio anglaise". Le même jour, sans davantage mentionner le contenu de l'appel, L'Écho d'Alger écrit que "le général de Gaulle sera traduit en cour martiale". Les jours suivants, les désaveux s'enchaînent dans la presse : La Gazette de Bayonne évoque "l'activité anti-nationale déployée par l'ex-général de Gaulle", Le Petit Parisien parle à son sujet d'attitude "inadmissible", Le Matin renchérit en le traitant d'"agitateur"...

 

Le 3 août, l'annonce de sa condamnation à mort par contumace, qui fait les gros titres, le fera largement connaître à la population française. Son appel ne deviendra célèbre qu'ultérieurement.