Extrait du journal
L’ORDRE RÉGNE A VARSOVIE... (Ballade.) En ce temps-là, Gortschakoff, prince à la longue épée, télégraphiait ainsi : 1 Sire, votre humble et fidèle lieutenant a la mort dans l’âme... Malgré tous ses efforts il ne peut parvenir à don ner à son empereur d’assez grandes preuves de son zèle. Sire, croyez-moi, c’est votre faute. Les Polonais, que nous espérions avoir écrasés à jamais, ont relevé la tête. Les criminels n’ont pas craint de com mettre un forfait épouvantable en honorant publique ment les mânes de leurs frères morts en 1831 sur le champ de bataille. Et moi, en voyant cette manifestation, j’avais espéré une occasion de signaler mon zèle. Déjà le sang avait coulé, déjà je me préparais à terrifier les sujets de votre majesté, quand vous avez arrêté mon bras. Pourquoi ? Pour me recommander la conciliation ! En vérité, je vous le dis, tant que vous parlerez de conciliation l’ordre ne régnera pas à Varsovie. II Encore une manifestation ! Je ne sais plus où donner de la tête. Ces maudits Polonais ont juré de me faire damner. Leur attitude est une perpétuelle provocation. Si vous saviez ce qu’ils osent faire, sire, si vous saviez! Les traîtres ont la perfidie de se renfermer dans les plus étroites bornes de la légalité. Pas un pavé n’a été remué, pas une arme n’a été tirée du fourreau. Ils ne connaissent que la loi et toujours la loi. J’avais raison de yous le dire, sire, l’ordre ne règne pas à Varsovie. • III Prudence, me répétez-vous. A quoi bon ? Ne sont-ilspasdes vaincus ? La prudence est de la faiblesse quand il s’agit des révolutionnaires. Chaque jour, ils viennent avec une impudente tran quillité m’apporter en députation l’expression d’un nou veau désir, la demande d’une nouvelle réforme. Ils arri vent ainsi dans le plus grand ordre, s’arrêtent devant mon palais sans proférer un cri, m’envoient un ambas sadeur qui me dépose un placet avec la plus exquise po litesse. Tantôt c’est à l’heure de mon déjeuner, tantôt au mo ment où j’allais partir pour faire un tour de promenade. Et il faut que je les écoute, que je les accueille, que je les regarde s’en aller silencieusement et méthodique ment. Osera-t-on prétendre après cela que je me trompais? Leurs coupables desseins ne sont-ils pas assez prouvés Par ceùe perfide placidité? ; Sire, entendez mon signal d’alarme. Sire, l’ordre ne règne pas à Varsovie. IV Pour e coup, je n’y tiens plus. Au diable la conciliation et la prudence. J ai fait mander ici toutes les troupes des environs. J étais las de l’inaction, mes soldats avaient besoin de se dégourdir les bras....
À propos
Fondé par Charles Philipon en 1832, Le Charivari fut le premier quotidien satirique illustré au monde. Régulièrement poursuivi pour sa critique de Louis-Philippe, le journal disparaît néanmoins bien plus tard, en 1937.
En savoir plus Données de classification - françois ii
- pierre véron
- varsovie
- garibaldi
- naples