Extrait du journal

Prudhomme illuminé. Contentons-nous de ce simple extrait : « Ce qui va se passer n’est pas inouï. Noé l’a vu. Mais l’arche de Noé était fermée, la barque de Pierre est ouverte. Pierre a entendu la voix qui lui dit de prendre le large : Duc in altum, occupe les amarres, quitte ces rivages devenus des écueils et va en haute mer ! Le pêcheur d’hommes jettera son grand filet dans les grandes eaux battues de tous les vents, et les en fants de l’Eglise recueilleront les naufragés de ce beau vaisseau de l’Etat, qui n’aura, lui, à jeter aux flots que son équipage plein de séditieux et d’esclaves, et ses engins de mort impuissants contre le courroux du ciel. Tous ne voudront pas périr, beaucoup élèveront les mains comme ceux qui furent sauvés au moment du déluge et par le déluge ; car le déluge fut aussi une miséricorde de Dieu. » Non, les écueils, le déluge, la haute mer et jusqu’au fameux vaisseau de l’Etat, cette machine dont les ma gasins d’accessoires ne veulent plus, tout y est!... Pauvre M. Veuillot ! son vitriol qui tourne à la gui mauve ! Si Millevoie vivait encore!... quelle élégie il pour rait faire ! Un pendant à la Chute des feuilles: la Chute de M. Baudrillart, car on parle déjà de la mise en retraite de ce publiciste. Franchement, il jouerait là à qui perd gagne. Le cinquième numéro de la Tribune contient d’excellens articles. Lire entre autres le bulletin de M,. André Lavertujon dont voici la conclusion : « M. Rouher a dit à l’opposition : « J’affirme que le pays vous désavoue. » On saura à l’automne prochain ou au printemps de 1869 jusqu’à quel point la nou velle affirmation de M. Rouher l’emporte sur ses affir mations anciennes. » M. Rouher a en effet l’affirmation trop prompte. Pour un oui ou un non, il vous lance un jamais » qu’il n’avait pas besoin de produire et jure volontiers sur sa tête quand ce n'est pas nécessaire. Aussi quelqu’un, à propos de cette manie de sermens, disait-il hier : — M. Rouher était ministre de la parole, il est main tenant ministre de la parole d’honneur. Pierre Véron. LE BUDGET DU CITOYEN Au budget de l’Etat peut-être n’est-il pas inutile d’apposer, pour l'instruction de nos chargés d’affaires, le budget privé du commun des martyrs, puisqu’il ne s’agit de rien moins, selon l’expression d’un de nos honorables, que « de trouver des recettes qui ne pèsent pas sur les contribuables. » L’occasion est bonne de savoir au juste à quoi s’en tenir, car précisément un ouvrier de nos amis vint hier au soir nous raconter qu’il avait reçu une singulière visite. C’était un gros monsieur décoré, fort bien vêtu, qui s’annonça tout simplement avec cet air dégagé que donne aux gens d’une certaine classe la conscience de leur supériorité. Nous transcrivons littéralement la conversation....