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Le Petit Marseillais, 14 octobre 1899

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Le Petit Marseillais
14 octobre 1899


Extrait du journal

Eh bien ! serait-il très digne de la France da dire aujourd’hui à la Russie : — J’attendais mieux que cela do votre amitié ; du moment qu elle ne me rapporte rien, je n’ai qu’en faire ; moi, il me faut des amis qui me servent à quelque chose. Ce langage serait assurément dans le der nier goût de la rosserie à la mode, mais il ne serait ni très convenable, ni très juste. La Russie pourrait en effet répondre : — Permettez ! Grâce à moi, vous vivez tranquille du côté de l’Allemagne depuis quelques années; grâce à* moi, vous avez pu étendre votre domaine colonial autant qu’il vous a fait plaisir, sachant que vous ne seriez inquiétée par personne sur le continent. Grâce à moi, vous pouvez tout à l’aise laver votre linge sale en famille et même en public, car vous m’accorderez bien que si on ne me sentait point là, der rière vous, vos ennemis auraient pu pro fiter de l’occasion pour vous chercher noise, çt vous n’étiez pas en posture pour leur répondre.Il est vrai que vos financiers et vos capitalistes me prêtent parfois les millions dont j’ai besoin ; mais avouez que Je leur en paie plus régulièrement les inté rêts que l’ont jamais fait les Turcs, les Grecs ou les Espagnols. Votre argent est encore mieux placé chez moi que dans le Panama. D’un autre côté, admettons que l’AlsaceLorraine soit suffisamment germanisée aujourd’hui pour que nous n’ayons plus grand espoir à fonder sur la revanche. Il faudrait tout de même que uous soyons bien peu tiers pour passer l’éponge sur Metz, Sedan et Paris. On voit fréquemment d’anciens rivaux et d’implacables ennemis se réconcilier, mais la première condition pour cette réconciliation est qu’ils soient manche à manche. Or, tant que nous n’au rons pas pris notre revanche de la cam pagne 1870-71, une entente sincère parait bien difficile. Nous aiu ions certainement tort de ne pas entretenir avec l’Allemagne les relations correctes et courtoises que semble vouloir nouer l’empereur Guillaume, mais nous aurions encore plus tort de dédaigner l’amitié de la Russie sous le prétexte assez mesquin qu’elle ne nous a pas rapporté tout ce que nous en attendions. Ayons au moins la pudeur du souvenir et sachons attendre que les événements aient mis nos amis à l’épreuve avant d’en changer. ADV....

À propos

Fondé en 1868 par Toussaint Samat, Lazare Peirron et Gustave Bourrageas, Le Petit Marseillais était le plus grand quotidien de Marseille, affichant un tirage de plus de 150 000 exemplaires en 1914. D'abord républicain radical, le journal s'avéra de plus en plus modéré au fil des ans. Dans un premier temps très local, il fut l’un des premiers journaux à publier dans la presse des récits de procès judiciaires sensationnels dès 1869, avant de s’ouvrir aux actualités internationales.

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