Extrait du journal
grandeurs et encore moins des pana ches. Devant les anciens combattants et toute la commune donc, le maire, puis le général ont, en quelques mots très émouvants, dégagé le sens de la cérémo nie. Ils ont avec raison insisté sur le mérite et la gloire des parents du jeune mutilé ; c’est également une note qui m’a infiniment plu. Il faut, dans notre pays, ne jamais perdre l’occasion de rendre aux pères et mères ce qui revient aux pères et mères. L'admirable conduite de nos soldats de 1914 à 1918 n’est pas de génération spontanée. Il est peu discuta ble qu*une fois de plus, c’est l’àme fran çaise qui a gagné la guerre. L’àme de nos soldats, qui l’avait formée, sinon l’éducation familiale et cette longue trar dition qui tient debout le foyer français T Ce pays Orléanais — en 1871 — a vu les Prussiens ; il ne s’y pouvait attendre à la veille de 1870 ; il en a été offensé et je dirai offusqué. Il en a gardé une grande rancune au gouvernement d’alors, mais il eût été puéril de s’en tenir à la rancune. Dès 1872, il a, avec toute la France, conclu qu’il fallait faire à la défense de nos frontières tous les sacrifices. Il a payé sans murmurer les impôts qu’a exigé l'organisation de la défense, et, encore qu’il lui en coûtât encore plus, il a donné ses fils, le'temps qu’on jugeait nécessaire pour qu’ils devinssent bous soldats. Il a été soulagé quand on lui a dit que deux ans suffi saient ; quand, en 1913. on a dit qu’il y fallait maintenant trois ans, ce sont eux qui, loin de les retenir, ont entraîné leurs députés à voter la grande loi de défense qui a contribué à assurer, dès 1914, l’échec de l’Allemagne. Mais, par surcroît, les enfants ont été élevés dans la pensée qu’à aucun prix il ne fallait « qu’on recommençât comme en 70 ». J’ajouterai qüc.nous étions en face d’une famille où les enfants sont élevés — sans prétention à faire mieux que les autres — dans l’esprit de devoir qui, avant la guerre, • consistait à faire au mieux l’humble besogne journalière, à être un bon écolier, puis un bon cultivateur. Et cela suffit à faire, à l’heure où il le faut, un bon soldat. Je répéterai toujours que, si l’on a pu tenir quatre ans dans les tranchées, c’est que notre armée était en immense majorité une armée de paysans qui a apporté à cette guerre nouvelle la vertu la plus propre à Ta faire gagner : Y endurance, qui est par excellence la vertu de nos campagnes de France. Los assistants s’associaient aux paro les qui étaient prononcées. Ces gens, au milieu desquels je vis (et que je connais depuis bientôt un demi-siècle que je passe quelques semaines parmi eux) ne sont point, je l’ai dit, manifestants. « Chez nous, disait un jour une brave femme de ce pays-ci, à mon grand-père, chez nous on ne crie jamais ni Vive ni \ bas ! » C’est tout à fait exact. On s’émeut en dedans. Dimanche, les lar mes étaient cependant aux yeux. Toute cette humble cérémonie était j pleine de leçons ; je les ai dégagées l’une après l'autre au cours de cet article ; je n’y reviendrai pas. Les moralités en nuient à se répéter ; les faits, même les plus modestes, parlent tout seuls. Celte solidarité des combattants de la grande guerre, sans jalousie aucune et cette fière revendication de l’honneur du camarade au profit de tous, cette association des • « vieux de 1870 » aux jeunes poilus de 1914, ce recours d’un fermier devenu propriétaire à ceux dont il a tenu la terre, cet élan de toute une commune autour d’un fils qui a payé d’un bien, presque aussi précieux que la vie, sa vail lance sans ostentation, cet hommage au foyer qui a formé ce tranquille petit héros et l’orgueil de tous ces braves gens — je dédie sans plus de phrases ce fais ceau de petits faits à la méditation des pessimistes. Ils sont petits, ces faits ; je m’exagère peut-être leur signification, mais je les ai trouvés très grands. LOUIS MADELIN....
À propos
Fondé en 1868 par Toussaint Samat, Lazare Peirron et Gustave Bourrageas, Le Petit Marseillais était le plus grand quotidien de Marseille, affichant un tirage de plus de 150 000 exemplaires en 1914. D'abord républicain radical, le journal s'avéra de plus en plus modéré au fil des ans. Dans un premier temps très local, il fut l’un des premiers journaux à publier dans la presse des récits de procès judiciaires sensationnels dès 1869, avant de s’ouvrir aux actualités internationales.
En savoir plus Données de classification - lloyd george
- guillaume ii
- vear
- eugène martin
- tirpitz
- ho
- feel
- chamberlain
- poincaré
- mac-mahon
- europe
- berlin
- france
- allemagne
- gladstone
- serbie
- autriche
- thrace
- angleterre
- potsdam
- conseil de cabinet
- domaine rural
- conseil de la couronne
- hôtel-dieu