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Le Petit Marseillais, 21 juillet 1909

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Le Petit Marseillais
21 juillet 1909


Extrait du journal

Etes-vous grasse ou maigre, madame ? La chose serait d’importance si vous etiez en Silésie. Un bon bourgeois de ce pays a divorcé parce que sa femme était devenue trop mince. Le tribunal a admis la légiti mité du cas. « Certes, disait le mari silésien, si ma femme avait maigri par suite d une mala die, je n’y trouverais rien à reprendre ; ce sont là les risques de la vie. Mais l’amai grissement de mon épouse résulte d’un plan prémédité. Je me suis marié avec une femme qui eût pu servir de modèle à Ru bens ou à Jordaens. Tel était mon goût. Surviennent les modes fatales qui exigent les robes collantes, les fourreaux et des for mes aplaties. Malgré mes conseils, ma dame suit alors un régime pour devenir svelte. Je l’aimais boule, la voici planche à pain. Elle avait des joues vermeilles, la voici pâle à faire peur. Elle était convexe quand je la pris, elle est maintenant con cave. Le mariage est l’accord de deux par ties. Si ma femme avait été maigre étant demoiselle je ne l’eusse pas épousée et si, à présent, elle se dépouille de son propre gré des formes amples et naturelles qu’elle ap porta en dot, j’ai le droit de prétendre qu’il y a eu tromperie sur la marchandise. » Les juges ont mûrement réfléchi et donné raison à cet homme mécontent. Des consi dérants sérieux appuient la sentence. Les contours de la dame silésienne ne sont plus accusés et, chose étrange, c’est pour cela même qu’ils sont condamnés. Que l’on ne s’y trompe pas, la manière de voir du tribunal allemand pourrait fort bien passer la frontière et, alors, que de ménages rompus pour cause de maigreur volontaire l Soyons équitables cependant. Prononcé sous prétexte d’amincissement concerté, le divorce devrait aussi être de droit poûr cause d’engraissement systématique, car qui blâme le moins doit aussi blâmer le plus. En conséquence, les femmes, pour n’être point répudiées, devraient se tenir...

À propos

Fondé en 1868 par Toussaint Samat, Lazare Peirron et Gustave Bourrageas, Le Petit Marseillais était le plus grand quotidien de Marseille, affichant un tirage de plus de 150 000 exemplaires en 1914. D'abord républicain radical, le journal s'avéra de plus en plus modéré au fil des ans. Dans un premier temps très local, il fut l’un des premiers journaux à publier dans la presse des récits de procès judiciaires sensationnels dès 1869, avant de s’ouvrir aux actualités internationales.

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