Extrait du journal

ouvrières sont encore à l’ouvrage : on les reconnaît à leurs marques coloriées qui, faites avec une poudre mêlee de talc, n'ont pas été effacées par le bros sage que les ouvrières subissent à l'inté rieur de la ruche. Les autres abeilles ne s’arrêtèrent pas à ce bouquet, comme si elles s'étaient rendu compte qu'un nombre suffisant de butineuses était occupé à la récolte de ces dix branches fleuries. Ces dix branches sont remplacées par vingt. Aux cinq butineuses précédentes s’en ajoutent six nouvelles. La propor tion est calculée. Autre exemple de raisonnement col lectif : Si l'on attache des morceaux de rayons de cire avec de la ficelle pour les placer dans les cadres d’une ruche, les abeilles soudent tous ces morceaux entre eux et reconstruisent des alvéoles dans les jonctions.de façon à ne former qu'un seul gâteau de cire par cadre. Mais, ceci fait, la colonie décidé que les morceaux de ficelle qui attachaient les rayons pri mitivement ne doivent pas rester dans la ruche. Ordre est donne à une escouade d’ouvrières, en fonction de îietloyeuses, d'avoir à enlever cette ficelle inutile. A cause de la faiblesse de leurs man dibules, il faut plusieurs jours à ces petits êtres pour pouvoir détacher suc cessivement des bouts de ficelle en les mordillant à leurs deux extrémités. Lorsqu'un de ces fragments est détaché, il tombe au fond de la ruche ; cinq ou six nettoyeuses le tirent, le font sortir par la porte, puis le disposent parallèle ment au bord du plateau de la ruche. Alors ces cinq ou six abeilles se placent à peu près à égale distance les unes des autres, prenant toutes la ficelle entre leurs mandibules. Et, sans qu’on puisse distinguer ni chef ni commandement, elles s’envolent toutes ensemble, puis retournent dans leur habitation pour s’occuper du fragment suivant. Autre expérience encore : Au fond du jardin, on place sur une table des morceaux de sucre ordinaire. Des abeilles y arrivent, mais ne peuvent inordre à ce sucre. Que faire ? C’est pourtant du bon sucre. Elles vont cher cher des butineuses occupées au service de l’eau, et celles-ci, arrivant du bassinabreuvoir ou elles se sont chargées d’eau, déversent cette eau sur le sucre, en contractant leur .jabot, et l’eau, au contact du sucre,le transforme en sirop. Alors les butineuses aspirent ce sirop avec leur trompe et le rapportent à la ruche. A partir de ce moment il s'orga nise un triple trajet de butineuses : f" de la ruche au bassin pour aller chercher de l’eau ; 2° du bassin aux morceaux de sucre pour y transporter l’eau ; 3° de ce point à la ruche pour rapporter un sirop dont la concentration est assez analogue au nectar et au liquide sucré des fleurs. Voilà une série d'actes de raisonne ment, de raisonnement tout à fait hu main. Ces petits êtres observent, jugent, s’entretiennent entre eux, délibèrent et agissent en conséquence. Et les hom mes 11e raisonnent pas toujours avec la même justesse, puisque nous voyons, parmi tous les fonctionnaires, a quelque ordre qu’ils appartiennent,soit de l'Etat, soit d'une administration quelconque, un si grand nombre d’individus cher cher à travailler le moins possible, se mettre dix pour un ouvrage que cinq peuvent faire et montrer ainsi qu’ils sont moins justes et moins honnêtes que les abeilles. L’ôsprit n’est donc pas l'apanage ex clusif de l’humanité. Dans tous ces exemples, ce n'est pas l’instinct qui est en jeu : c’est l'intelligence. Un jour, M. Bonnier remplaça des gouttes de sirop de sucre que scs abeilles avaient pris l'habitude de venir cher cher, par des gouttes de miel extrait d’une ruche. Etonnées, les abeilles s’agi tèrent, puis revinrent en masse com pacte et menaçante, cherchant de tout côté où pouvait être la ruche abandon née, pénétrant dans les hangars par tou...