La tradition qui veut que la Révolution ait commencé le 21 juillet 1788 à Vizille est bien ancrée. Elle a d’autant plus de supporters que cette journée a rassemblé les trois ordres à l’initiative de « révolutionnaires » modérés, partisans en définitive des réformes et défenseurs de la monarchie parlementaire.
On oublie alors davantage les journées de janvier 1789 à Rennes, quand deux nobles et un roturier meurent au cours d’un affrontement entre jeunes nobles et jeunes « patriotes » pendant la réunion des États de Bretagne statuant sur les modalités des élections aux États généraux.
Les nobles bretons refusent l’arrangement de Vizille où la noblesse locale a accepté le doublement des députés du Tiers État. Ils s’étaient déjà soulevés contre le roi qui avait voulu réduire le rôle du parlement. Le 8 juin 1788, l’émeute avait été évitée de justesse. En juillet 1788, douze nobles contestataires avaient été envoyés à la Bastille ! N’y voyons pas de futurs révolutionnaires !
Les « patriotes » en revanche soutiennent la décision royale même s’ils attendent des mesures plus radicales à commencer par les réductions des impôts qui pèsent sur les roturiers et une refonte des institutions bretonnes, administrations locales comprises.
« Le Roi informé du refus que font les Députés du Tiers-état de sa province de Bretagne, de délibérer sur aucune affaire, & notamment sur une grande partie des demandes de Sa Majesté, en se fondant sur les restrictions apportées dans le cahier de leurs charges, Sa Majesté auroit pu, dans sa justice, casser les délibérations des villes qui se sont permis de lier ainsi, contre les loix & les usages de la Bretagne, le vœu de leurs députés ; mais Sa Majesté étant instruite de l’esprit de dissention qui règne dans la province […] a pris la résolution de suspendre la séance des États jusqu’au 3 Février. »