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L'exécution de Landru en 1922

le par - modifié le 05/08/2020
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Le 30 novembre 1921, le jury de Seine-et-Oise reconnaît Landru coupable de onze meurtres et le condamne à la peine capitale. Après avoir couvert le procès en détail, la presse relate les derniers moments de l’illustre condamné qui est exécuté au matin du 25 février 1922 à Versailles.

Les dernières démarches

Deux démarches peuvent retarder ou annuler l’exécution. La première est celle d’un rédacteur du Petit Journal qui transmet à Maître de Moro Giafferi un courrier de Montréal contenant des renseignements sur une dame Héon, arrivée au Canada en 1916 mais décédée depuis (Le Petit Journal, 25 février 1922). D’ailleurs jusqu’au dernier instant, des journalistes s’attendent à des révélations de dernière minute ou à des aveux (Le Petit Journal, 25 février 1922).

Henri Désiré Landru sous la guillotine, en haut Vincent de Moro-Giafferi et Alexandre Millerand, 1922 - source : Gallica-BnF
Henri Désiré Landru sous la guillotine, en haut Vincent de Moro-Giafferi et Alexandre Millerand, 1922 - source : Gallica-BnF

La seconde démarche est celle qui consiste à faire usage de toutes les dispositions juridiques possibles. Le dernier espoir s’éteint le 24 février lorsque le président de la République, Alexandre Millerand, refuse d’appliquer la grâce présidentielle. Ce refus connu, la nouvelle de l’exécution se répand rapidement à Paris et à Versailles. En raison de la popularité du supplicié et de la couverture médiatique du procès, des mesures exceptionnelles sont prises dans l’urgence.

Henri Désiré Landru (1869-1922)

 

Landru vit durant plusieurs années du fruit d’escroqueries qui lui valent plusieurs séjours en prison. Entre 1914 et 1918, il séduit plusieurs femmes, les délaissent de leurs économies avant de les assassiner et de faire disparaître leurs corps en les incinérant. Arrêté en avril 1919, Landru est accusé de onze disparitions. À la suite d’un procès-fleuve qui devient même un rendez-vous mondain, durant lequel il clame son innocence, il est condamné à mort. Son histoire et sa personnalité en font un personnage hors-norme qui a passionné de nombreux artistes, comme Claude Chabrol qui lui consacre un film en 1963.

Henri Landru
Henri Landru - source : Gallica-BnF

Des mesures exceptionnelles

En raison du nombre important de journalistes venus de Paris, un accueil spécial est assuré à l’hôtel de ville par le commissaire de police afin de délivrer les « laisser-passer » pour assister à l’exécution (Le Petit Journal, 25 février 1922). Plusieurs journalistes constatent avec un certain dépit que de « nombreuses jolies femmes » (L’Ouest Eclair, 26 février 1922) se sont déplacées pour assister à l’exécution (La Presse, 25 février 1922) afin donner satisfaction à leur « curiosité malsaine » (L’Ouest Eclair, 26 février 1922).

Exécution de Landru à Versailles. La foule des curieux devant la prison, 1922 - source : Gallica-BnF
Exécution de Landru à Versailles. La foule des curieux devant la prison, 1922 - source : Gallica-BnF

À trois heures du matin, tous les badauds sont refoulés au-delà des nombreux barrages érigés à travers la ville (Le Petit Journal, 25 février 1922) et le seul café ouvert fermé sur ordre de la police (La Presse, 25 février 1922) afin d’éloigner les curieux qui sont « impitoyablement évincés » (Le Journal, 25 février 1922). Le journaliste du Journal note un « déploiement inusité de troupes de cavalerie, infanterie et gendarmerie » (Le Journal, 25 février 1922). Ce n’est qu’au dernier instant que la guillotine est dressée juste devant la porte de la prison de Versailles (L’Ouest Eclair, 26 février 1922).

La fin de « Barbe-Bleue de Gambais »

Jusqu’au dernier moment, Landru ne cesse de proclamer son innocence, ce qui se révèle être pour le journaliste du Matin l’ultime occasion de « demeurer Monsieur Mystère » (Le Matin, 26 février 1922). Chaque geste et chaque parole de Landru sont repris et détaillés dans tous les journaux. Seul le journal La Croix se refuse à publier un récit détaillé, se contentant du minimum et d’un appel à la prière pour ce criminel qui « a droit en pareilles circonstances aux prières des fidèles » (La Croix, 26 février 1922). Face à ce personnage fascinant (Le Petit Journal, 25 février 1922), même l’abbé Loisel, aumônier de la prison, déclare qu’il s’agit d’un « homme extraordinaire ! », s’étonnant de son sang-froid face à la mort (L’Ouest Eclair, 26 février 1922).

La tombe de Landru au cimetière de Versailles, 1923 - source : Gallica-BnF
La tombe de Landru au cimetière de Versailles, 1923 - source : Gallica-BnF

Si la quasi-totalité des journaux sont satisfaits de l’exécution de la peine capitale, L’Humanité profite de l’occasion qui lui est offerte pour dénoncer « la justice des bourgeois » qui tue un homme qui a tué mais sans avoir pour autant de preuves formelles (L’Humanité, 25 février 1922). Fernand Despres, journaliste à L’Humanité, voit dans le comportement digne de Landru une « forte leçon de dignité » donnée au monde judiciaire (L’Humanité, 26 février 1922).

On se réjouit donc de voir ce criminel expié ses crimes (L’Écho de Paris, 26 février 1922) mais on déplore que la science ne puisse s’attarder plus sur ce cas. Après avoir été inhumé dans le cimetière des Gonards, le corps est rendu à la famille ce qui empêche une autopsie qui aurait permis aux médecins de déterminer s’il s’agissait d’un « monstre au cerveau anormal ou d’un malfaiteur vulgaire » (Le Journal, 26 février 1922). Landru restera donc une « énigme psychologique » (L’Écho de Paris, 26 février 1922).

L'Affaire Landru

Reconstitution du procès de Landru, séducteur quinquagénaire, qui brûlait le corps de ses conquêtes dans le poêle de sa maison de Gambais, après les avoir dépouillées et tuées. L'affaire éclata le 12 avril 1919, et Landru fut guillotiné le 25 février 1922. Cette émission ne se déroule pas comme les précédentes. Afin de ménager certains acteurs du drame et du procès qui sont encore vivants à l'époque du tournage comme le docteur Paul, qui pratiqua les expertises, le commissaire Belin qui arrêta Landru ou Maître Moro-Gaffieri, mort quelques jours avant le tournage, le réalisateur a privilégié un constat des faits, à partir des agissements de Landru avec quelques-unes de ses victimes.

Bibliographie

 

René Masson, Landru, Le Barbe-Bleue de Gambais, Paris, Rombaldi, 1974.


Christine Sagnier, L’affaire Landru, Paris, De Vecchi, 2006.


Gérard Jaeger, Landru : bourreau des cœurs, Paris, L’Archipel, 2005.


Eric Yung, Landru - 6h10 – Temps clair, Paris, Musée des lettres et manuscrits, 2013.