Écho de presse

C'était à la Une ! 1923, Carpentier abat Beckett en 48 secondes

le 16/12/2022 par France Culture
le 17/11/2017 par France Culture - modifié le 16/12/2022
Georges Carpentier, boxeur - Source Gallica BnF

La lecture du jour retrace le combat de Georges Carpentier, "l'homme aux mains de verre" face à Joe Beckett en 1923.

En partenariat avec "La Fabrique de l'Histoire" sur France Culture

Cette semaine : Georges Carpentier abat Joë Beckett en 48 secondes, Le Petit Journal, 2 octobre 1923 

Texte lu par : Nathalie Kanoui

Réalisation : Séverine Cassar

« GEORGES CARPENTIER ABAT JOË BECKETT EN 48 SECONDES

Londres, 1er Octobre. — Dans l'immense hall de l'Olympia, rempli d'une foule, dans laquelle sont représentées toutes les classes, Georges Carpentier vient à nouveau de triompher de Joe Beckett, le champion poids lourds de Grande-Bretagne. En 1919, le 4 décembre, au Holborn Stadium, le Français avait mis exactement 1 minute 14 secondes pour abattre le même adversaire et cette performance n'avait de comparable dans les annales pugilistiques que celle accomplie par le même Georges Carpentier, le 8 décembre 1913, date à laquelle il triompha de Bombardier Wells en 1 minute 13 secondes.

Ces deux records furent battus ce soir, et d'assez loin. C'est en effet au bout de 48 secondes seulement que se termina la lutte, si tant est que l'on puisse dire qu'il y a eu lutte dans un match qui dura juste le temps de placer le coup qui donne la victoire. Que l'on retire en effet les 10 secondes fatidiques égrenées par l'arbitre et il reste 38 secondes.

Quoi qu'en pensent certains, une victoire aussi concluante aura sa répercussion Outre-Manche et même en France ; il n'est point excessif de dire que Georges Carpentier, celui que l'on appela autrefois « notre Georges national », est toujours le porte-drapeau du pugilisme français. L'homme aux mains de « verre » a reconquis ce soir auprès du public britannique, son prestige d'antan.

Je vous ai dit plus haut, que la salle était archicomble, vous en aurez une idée, quand je vous aurai donné le chiffre de la recette ; celle-ci fut de 30.000 livres, ce qui au cours du change représente 2.220.000 francs. Et là aussi, tous les records européens pour une réunion sportive furent battus et d'assez loin.

LE MATCH

Les matches qui précèdent la grande rencontre laissent le public assez froid ; les minutes s'écoulent et à 22 heures Joe Beckett fait son apparition : la foule l'acclame et ovationne également Georges Carpentier qui arrive immédiatement après.

On procède aux opérations préliminaires, choix des gants, pose des bandelettes, et les deux adversaires attendent très calmes, le signal ; le coup de gong retentit 10 minutes après que les boxeurs sont entrés sur le ring. Un silence impressionnant règne à ce moment dans la salle.

Le timbre finit à peine de résonner que Carpentier s'élance sur la pointe des pieds et décoche à son adversaire un coup du gauche, qui ne semble pas affecter Beckett.

Après ce premier contact, les deux hommes se remettent en garde. Carpentier part avec la rapidité de l'éclair, fait une feinte du gauche, et le fameux crochet du droit se déclanche. Avec une précision extraordinaire le coup arrive à la pointe du menton du boxeur britannique, qui fléchit sur ses jambes.

Avant que Joë Beckett soit revenu de sa stupeur, le droit de Carpentier est revenu à la même vitesse, toujours à la pointe du menton, et cette fois le champion britannique mesure le canevas.

L'arbitre égrène les secondes ; le corps de Beckett est agité par des soubresauts, mais l'Anglais trouvera cependant la force de se remettre sur ses jambes avant le compte fatal. On sent à ce moment que le match ne peut plus aller loin, car lorsque Joe Beckett se remet en garde, il semble avoir perdu la notion des choses.

Le droit de Carpentier part une troisième fois et ce sera la bonne, car le boxeur britannique s'écroule sur le dos, près des cordes ; s'accrochant à celles-ci, Beckett fait des efforts désespérés pour se relever, tandis que l'arbitre recommence compter.

Il n'est pas douteux que le champion anglais est knock-out, mais pour éviter cette décision les soigneurs, sentant qu'il n'y avait plus aucun espoir, jettent l'éponge, annonçant ainsi que leur homme abandonne. Mais l'arbitre ne l'entend pas ainsi ; il continue à compter et déclare, après les 10 secondes écoulées, Carpentier vainqueur par knock-out.

La victoire du Français est accueillie par une ovation formidable ; toute la salle est debout et des spectateurs enthousiastes sautent sur le ring et hissent le « frenchman » sur leurs épaules. »