Car finalement, selon Brassens, l’appartenance religieuse n’est en aucun cas un gage de bonne conduite. Et pour preuve : parmi les pèlerins de Lourdes se trouve Edmond Michelet, résistant de la toute première heure, mais nommé Ministre des Armées par le Général de Gaulle au lendemain de la guerre (« ministre-de-la-guerre-par-nécessité », attaque Brassens).
Les religieux ne s’opposent donc pas à la violence entre les hommes, pas plus qu’ils ne respectent le vœu de pauvreté pourtant préconisé par « la religion de Jésus Christ » : dans une église à Rouen, rapporte le journaliste, des personnes ont trouvé et volé des « calices en or et en argent massif ainsi que [des] colliers de pierres précieuses ». Si les principaux concernés par les enseignements théologiques ne se conforment pas leurs préceptes, quelle autorité morale ont les croyants sur les athées ?
« Je n’ai jamais tué, jamais violé non plus / Y’a déjà quelque temps que je ne vole plus / Si l’Éternel existe, en fin de compte il voit / Que je me conduis guère plus mal que si j’avais la foi » conclura Brassens dans « Le mécréant ».
En 1947, Brassens met un terme à sa brève collaboration avec l’organe de la Fédération anarchiste. Retraité du militantisme organisé, son engagement libertaire ne cessera cependant jamais. Il continuera d’ailleurs à se produire dans des galas organisés par la presse libertaire.
Dans les années 1950, sa carrière de parolier décolle, aidée par Patachou qui l’invite à se produire dans son cabaret de Montmartre. C’est le début de la gloire, qu’il connaîtra jusqu’à sa mort. En deux décennies il enregistrera plus d’une douzaine d’albums et rentrera au Panthéon de la chanson française. Il casse sa pipe le 29 octobre 1981, deux semaines après l’abolition de la peine de mort. Jamais son trou dans l’eau ne se referma.
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Pour en savoir plus :
Brassens, Georges. Œuvres complètes, (dir. Jean-Paul Liégois), Paris, Le Cherche-midi, 2007
Deroudille, Clémentine. Brassens : Le libertaire de la chanson, Paris, Gallimard, coll. « découvertes », 2011
Lamy, Jean-Claude. Brassens : Le mécréant de Dieu, Paris, Albin Michel, 2004