L’histoire personnelle de Maurice Genevoix est celle d’une impressionnante ascension sociale. L’Excelsior propose une courte biographie du normalien, vétéran de la Grande Guerre, à propos de laquelle il a écrit quatre ouvrages, aujourd’hui regroupés dans le recueil intitulé Ceux de 14 – dont un lui avait déjà valu une nomination pour le prix Goncourt de 1916.
En ressort l’excellence académique de ce Niverais, qui en 1919 atteint de la grippe espagnole, est contraint de regagner sa province d’origine – à laquelle il consacre par ailleurs nombre de ces romans, au point d’en faire un « écrivain régionaliste » pour certains.
Si la plupart de la presse salue la décision du jury, a l’image du Petit Parisien qui affirme que « Genevoix, robuste écrivain […], est un très bon prix Goncourt », d’autre s’avèrent moins convaincus par son choix. C’est le cas de Gaston de Pawlowski, ancien rédacteur en chef du grand quotidien culturel Comœdia, qui publie un article critique dans les pages des Annales politiques et littéraires.
Visiblement irrité par le fait que le prestigieux prix a été attribué à René Maran, écrivain antillais noir, quatre ans auparavant, il reproche aux « Dix » de faire désormais de leur prix une récompense militante, au détriment d’une littérature jugée plus noble.
« Si M. Maurice Genevoix n’est point nègre, − ce qui vaudrait mieux, évidemment, pour l’Académie Goncourt − il appartient tout au moins à une région spéciale de la France à laquelle il paraît fortement attaché : il habite Châteauneuf-sur-Loire, et aime passionnément la Sologne, où le retiennent encore ses blessures de guerre.
C’est donc, en quelque sorte, un écrivain régionaliste, ce qui suffit à rassurer les membres de l’Académie Goncourt, qui tient à garder la prééminence en tant qu’écrivains généraux. […]
Après la brousse africaine, après les marais de la Brière, voici donc les régions de chasse de la Sologne ; le Prix Goncourt, si cela continue, pourra être décerné par la Société de Géographie. »