Séquence pédagogique

La prise de la Bastille, un symbole fort pendant la Révolution (1789-1799)

le par - modifié le 05/09/2024
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En dépit du fait que la Bastille ne soit plus un lieu de pouvoir central, sa prise par les Parisiens est perçue dès le départ comme un acte populaire décisif. S’intéresser à son évocation dans la presse pendant les années qui suivent permet également de montrer aux élèves comment se construit la mémoire nationale de l’événement, du lieu et comment les ruines de la forteresse se patrimonialisent.

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Quatrième histoire : Thème 1 - Le XVIIIe siècle, expansions, Lumières et révolutions - La Révolution française et l’Empire : nouvel ordre politique et société révolutionnée en France et en Europe.

Première Générale histoire : Thème 1 : L’Europe face aux révolutions - Chapitre 1. La Révolution française et l’Empire : une nouvelle conception de la nation)

Première technologique histoire : Thème 1 : L’Europe bouleversée par la Révolution française (1789-1815) - Question obligatoire A :  L’Europe bouleversée par la Révolution française (1789-1815)

Seconde professionnelle histoire : Circulations, colonisations et révolutions (XVe-XVIIIe siècle) – Thème 2 : L’Amérique et l’Europe en révolution (des années 1760 à 1804)

 

Introduction

Le 14 juillet 1789, la prise de la Bastille marque un tournant capital dans les bouleversements que connaît la France depuis le printemps. Pourtant, la « rébellion française » n’est pas nouvelle dans le royaume en crise ; rien que pour les quatre premiers mois de l’année, plus de 300 insurrections populaires ont été recensées. En outre, la vieille forteresse ne représente plus un lieu de pouvoir important au cœur de la ville et sa démolition était même prévue. Néanmoins, le soulèvement parisien est d’emblée perçu comme un événement essentiel dans la Révolution qui s’amorce. Depuis l’ouverture des États généraux à Versailles le 5 mai, plusieurs journées ont déjà marqué une rupture avec le régime politique en place, malgré l’opposition du roi. Celles des 17 et 20 juin, puis celle du 9 juillet, ont en effet entraîné la métamorphose de l’Assemblée, devenue nationale et constituante. Cette révolution juridique, menée par les députés du tiers, est suivie avec passion à Paris, dans un climat d’espoir et d’inquiétude. C’est dans cette atmosphère que les tensions changent d’ampleur et de nature. Il est ainsi intéressant de comprendre en quoi cette insurrection populaire prend une dimension fondatrice dans l’imaginaire révolutionnaire, au-delà de l’épisode lui-même. La presse révolutionnaire est ainsi un prisme très riche pour en comprendre les enjeux.

 

Une journée insurrectionnelle qui marque une nouvelle étape dans la Révolution en marche

La Bastille, forteresse construite au XIVe siècle, a d’abord une fonction militaire, celle de protéger l’entrée orientale de Paris, dans le faubourg Saint-Antoine. Devenue prison d’État à partir du XVIIe siècle, elle accueille notamment des membres de l’élite, des hommes accusés de « faits de lettres » ou de faux-monnayeurs. Mais la Bastille remplit également d’autres fonctions. Elle représente un dépôt important d’archives de la lieutenance de police et un dépôt d’armes.

Dans la seconde moitié du XVIIIe siècle, la forteresse médiévale est de plus en plus dénoncée comme le symbole de l’inhumanité de la prison, lieu d’épouvante et de tortures de toutes sortes, alors même qu’elle n’est plus un lieu de détention majeur. Elle symbolise aussi le despotisme royal attaché à la lettre de cachet, cependant abolie par Louis XVI en 1785. En juillet 1789, la forteresse est défendue par 82 soldats invalides et 32 Gardes suisses et gouvernée par le marquis de Launay, qui assiste, sur le qui-vive, aux premières émeutes qui secouent la ville. 

Document 1 : Une situation tendue à Paris dans les jours qui précèdent

A noter : La Gazette nationale ou Le Moniteur universel voit le jour le 24 novembre 1789 avec Charles-Joseph Panckoucke, éditeur de l’Encyclopédie de Diderot et d’Alembert. Pour documenter les événements allant de la réunion des États généraux du 5 mai 1789 jusqu’au 23 novembre (la veille de la création du journal), Panckoucke édite une anthologie, écrite a posteriori, sous le même format que le journal.

«  Pendant que l'Assemblée nationale paraissait s'abandonner avec une sorte de sécurité aux sentimens d'amour et de confiance que les Français sont si portés à accorder à leur roi, ce prince, jouet d'une infâme cabale, était près, sans le savoir, de couvrir de son nom une des plus odieuse conjuration que l'histoire ait transmises à la mémoire des hommes. [...]

Voici les détails avec lesquels on rapporte le projet qui paraît avoir été adopté par la cour :

L'Assemblée nationale devait être dispersée, ses arrêtés déclarés séditieux, ses membres proscrits, le Palais-Royal et les maisons des patriotes livrés au pillage, les électeurs et les députés aux bourreaux. Tout était prêt pour consommer ce crime. Des brigands armés de haches, de torches et de poignards, attendaient leur proie ; la Bastille et les gibets, leurs victimes.

La nuit du 14 au 15 juillet avait été fixée, dit-on, pour l'invasion de Paris. Les Invalides devaient faire résistance, et s'opposer à l'enlèvement des armes et du canon, en faisant feu sur le Peuple. Au même instant les brigands campés au champ-de-Mars, composés de régimens de Salis-Samade, Château-Vieux et Diesbach Suisses ; des hussards de Bercheny, Esthernasy et Royal-Dragons, devaient courir au secours des Invalides avec de l'artillerie.

[...] Tel est l'horrible tissu de forfaits, de brigandages et d'assassinats qu'une troupe de scélérats et de femmes perdues méditaient avec une joie barbare dans le tumulte de leurs exécrables orgies, pour forcer Paris à capituler avec la tyrannie.

[...] Mais ceux des conjurés qui investissaient le roi, crurent faire un grand pas en précipitant le départ du ministre, dès le 11, M. d'Artois, seconde de M. de Breteuil, obtiennent de la faiblesse du monarque le renvoi de M. Necker qui reçoit l'ordre de sortir du royaume dans les vingt-quatre heures, avec tout le secret et toute la célérité possibles.

[...] La cour prévoyant l'impression que ferait sur les esprits le départ de M. Necker, avait envoyé ses satellites pour prévenir l'effet des premiers mouvemens, et avait fait avancer Royal-Allemand et le régiment des Gardes-Suisses, précédé de canons. [...] Un garde-française sans armes perd la vie, quelques autres personnes sont blessées.

[...] A cette vue, les cris redoublés "aux armes ! aux armes !" se répètent successivement du Pont-Royal dans tout Paris, quelques épées brillent, le tocsin sonne dans toutes les paroisses ; on court à l'Hôtel-de-ville, on se rassemble, on enfonce quelques boutiques d'armuriers ; des gardes-françaises s'échappent de leurs casernes, se mêlent avec le Peuple, et déployant une marche plus régulière, impriment ainsi le premier mouvement à la révolution. »

- Source : Gazette nationale ou le Moniteur universel, du 17 au 20 juillet 1789, p. 1

Questions à partir du document 1 :


1) Selon le compte-rendu de la Gazette nationale, qu’est-ce qui explique l’insurrection des Parisiens ?

2) En vous appuyant sur votre cours ou sur vos recherches personnelles, quels faits sont avérés et quels autres se rapportent à des rumeurs ?

3) Comment est perçu le roi dans ce document ? Et la Cour ?

4) Comment expliquer que la population bascule dans l’insurrection ?

Dès le 13 juillet, face à la situation insurrectionnelle qui se propage dans la ville, les électeurs de Paris (les électeurs du tiers ayant participé aux élections des États généraux) créent à l’Hôtel de Ville un nouveau pouvoir municipal, le « comité permanent » et une milice bourgeoise, la garde parisienne. Il s’agit de maintenir l’ordre à Paris et de montrer son soutien à l’action de l’Assemblée constituante à Versailles.

La garde parisienne et les émeutiers cherchent alors des armes et des munitions pour se défendre. Les négociations pour en obtenir, mais aussi les pillages, se multiplient dans la nuit du 13 au 14. A l’aube du 14 juillet, l’Hôtel des Invalides est pillé, livrant quelque quarante mille fusils aux insurgés qui se massent alors devant la Bastille pour obtenir des munitions.

Document 2 : Le peuple converge à la Bastille le 14 juillet

«  A la première nouvelle de l'attaque de la Bastille, dont le nom réveille les idées des lettres-de-cachet, d'opprobre et d'oppression, les têtes s'allument, la fureur les transporte et l'audace s'élève soudainement au niveau de la terreur imprimée si long-tems par ce nom formidable. La foule des assaillants augmente de moment en moment ; elle se grossit de citoyens de tout âge, de tout sexe, de toutes conditions, d'officiers, de soldats, de pompiers, de femmes, d'abbés, d'artisans, de journaliers, la plupart sans armes, et rassemblés confusément ; tous mus par une impulsion commune, s'élancent des différents quartiers de Paris, et se précipitent par cent chemins divers, à la Bastille. Le fauxbourg Saint-Antoine, placé sous l'artillerie du fort, plus animé encore en raison de sa proximité, y afflue tout entier. On y voit aussi accourir des gens de la campagne, des étrangers et des guerriers récemment arrivés de différents pays. »

- Source : Gazette nationale ou le Moniteur universel, 23 juillet 1789, p. 1 

Des négociations s’engagent entre la foule et le gouverneur de la forteresse, mais des coups de feu sont tirés et le combat s’engage. Launay capitule après quelques heures et les assaillants, furieux, entrent dans la citadelle. Le peuple qui assiège la Bastille est alors double, d’un côté la minorité des combattants (moins d’un millier), de l’autre l’immense foule qui observe et soutient l’événement. 

Document 3 : Le bilan de cette journée révolutionnaire

«  On trouva sept prisonniers, que l'on conduisit en triomphe au Palais-Royal. Ces infortunés étaient dans une espèce de ravissement et se croyaient bercés par les illusions d'un songe, dont le charme ne serait que momentané. Mais bientôt ils aperçoivent le chef sanglant de leur bourreau, suspendu à la pique fatale, au haut de laquelle on lisait en gros caractères : "De Launay, gouverneur de la Bastille ! perfide et traître envers le Peuple". Ils détournent la vue ; et les yeux baignés de pleurs de la reconnaissance, ils lèvent les mains vers le ciel pour bénir leurs libérateurs et les premiers instants de leur liberté. 

Les clefs de la forteresse furent remises à M. Brissot qui, peu d'années auparavant, avait lui-même été jeté dans ces antres du despotisme ; et trois mille hommes furent envoyés pour garder ces odieuses tours, en attendant qu'un arrêté de la ville eût confirmé le vœu du Peuple qui demandait leur destruction. 

Nous ne rapporterons point ici une foule d'actions de courage qui, dans cette journée, étonnèrent les plus braves militaires eux-mêmes. Il n'est pas surprenant que l'on montre de l'héroïsme, lorsque l'on combat pour les deux choses les plus chères à tous les hommes, la Patrie et la liberté. Ces deux sentiments remplissaient alors tous les cœurs. Nous nous bornerons à citer quelques traits qui prouvent que ce n'est point une valeur brutale qui caractérise les guerriers plébéiens qui remportèrent cette victoire, et que l'on retrouve chez eux cette élévation et cette délicatesse de sentiment que l'éducation même donne si rarement à ces hommes qui se disent grands. »

- Source : Gazette nationale ou le Moniteur universel, 24 juillet 1789, p. 2

Le bilan fait état de plus d’une centaine de victimes, dont le gouverneur lui-même, quelques soldats défenseurs de la forteresse et le prévôt des marchands, Flesselles, accusé d’avoir trahi le peuple. Les têtes des victimes sont symboliquement promenées dans les rues au bout de piques.

A l’Hôtel-de-ville, au même moment, Bailly, le président de l’Assemblée, a été nommé par acclamation chef de la nouvelle municipalité et La Fayette, commandant en chef de la milice parisienne. Le roi Louis XVI prend le mesure de la situation. Il annonce le retrait des troupes le 15, rappelle Necker le 16. Le 17 juillet, il se rend à Paris où il est accueilli par Bailly et La Fayette et reçoit une cocarde tricolore. Mais l’événement marque aussi le début de ce que l’on va appeler l’émigration. Des nobles, le comte d’Artois et plusieurs membres de la cour, quittent alors le royaume.

Questions sur les documents 2 et 3 :


1) Dans les documents 2 et 3 tirés de la Gazette, comment est perçue la Bastille par la population ? Que dire cependant de son rôle comme prison d’Etat en 1789 ?

2) Qui sont les assaillants de la Bastille évoqués dans ces deux documents ?

3) Quelle impression donne la Gazette de ce peuple en action ?

Un lieu symbolique, entre destruction et patrimonialisation

Document 4 : Dès le 15 juillet 1789, démolir le symbole de la tyrannie

« On a parlé de la démolition de la Bastille ; elle a été sur-le-champ arrêtée, et l'ordre en a été rédigé en ces termes :

"Le comité permanent établi à l'hôtel-de-ville provisoirement autorisé jusqu'à l'établissement d'une municipalité régulière, et librement formée par l'élection des citoyens ;

A arrêté que la Bastille sera démolie sans perte de tems, après une visite par deux architectes chargés de diriger l'opération de la démolition [...]

L'ordre de la démolition a été sur-le-champ proclamé par les trompettes de la ville dans la cour de l'hôtel, et dans tous les carrefours de Paris, au nom de M. le marquis de la Fayette commandant-général [...]. »
- Source : Gazette nationale ou le Moniteur universel, 31 décembre 1789, p. 20-21

Questions sur le document 4 :


1) Quels sont les deux autorités nouvelles qui prennent en charge la démolition de la Bastille ? Qu’est-ce que cela montre ?

2) Quelles traces de la Bastille doivent être conservées et pourquoi ?

Document 5 : visite de représentants de la commune d’Argenteuil au citoyen Palloy  en 1791

Pierre-François Palloy (1755-1835), le « patriote Palloy » comme il se fait appeler, architecte de la ville, est l’entrepreneur qui gère les travaux de démolition, employant quelque 800 ouvriers.

« Le Patriote Palloy qui, comme on sait, a fait un cadeau d'une petite bastille à chaque département, (objet qui lui a coûté plus de cinquante mille écus) a voulu aussi que les amis de la constitution d'Argenteuil ne fussent pas privés de nombreux travaux de son patriotisme ; il a fait présent à cette société d'une pierre de la bastille, ayant la forme de quarré long, de quatre pieds environ sur trois de large ; dans cette pierre est artistement encadré le plan de l'asyle du despotisme [...] »

- Source : Mercure universel, 19 juin 1791, p. 6

Document 6 : Séance de l’Assemblée nationale, du 16 juin 1792

« On entendit un rapport du comité d'instruction publique, tendant à faire construire une place publique sur le terrain de la Bastille, et à ériger au milieu un monument. l'assemblée rendut sur-le-champ un décret, dont voici la substance : Il sera formé sur le terrain de la Bastille une place, qui portera le nom de Place de la Liberté ; au milieu sera élevée une colonne, surmontée de la statue de la liberté. La première pierre de ce monument sera posée le 14 juillet prochain. Tous les artistes de l'Empire sont invités à concourir au dessin de cette place et du monument. »

- Source : Thermomètre du jour, 18 juin 1792, p. 8

Question sur les documents 5 et 6 :


1) Comment s’entretient la mémoire du lieu dès la Révolution ?

Le monument n’est finalement pas érigé et l’année suivante, en 1793, une éphémère fontaine est construite, « la fontaine de régénération » célébrant la prise des Tuileries le 10 août 1792, et non plus la prise de la Bastille.

La prise de la Bastille, des acteurs et un événement à célébrer

Dès l’année suivante, les combattants de la Bastille sont officiellement reconnus par la nation. Un décret du 19 juin 1790 crée le diplôme de « Vainqueur de la Bastille ». Une liste de plus de 950 noms, morts ou survivants, est dressée par l’Assemblée nationale.

Document 7 : La Nation célèbre les héros de l’insurrection

« L'assemblée nationale, frappée d'une juste admiration pour l'héroïque intrépidité des vainqueurs de la Bastille, & voulant donner, au nom de la nation, un témoignage public à ceux qui ont exposé & sacrifié leur vie pour secouer le joug de l'esclavage & rendre leur patrie libre :

Décrète qu'il sera fourni, aux dépens du trésor public, à chacun des vainqueurs de la Bastille, en état de porter les armes, un habit & un armement complet, suivant l'uniforme de la nation ; que sur le canon du fusil , ainsi que sur la lame du sabre, il sera gravé l'écusson de la nation avec la mention que ces armes ont été données par la nation à tel vainqueur de la Bastille, & que sur l'habit il sera appliqué, soit sur le bras gauche soit à côté du revers gauche, une couronne murale : qu'il sera expédié à chacun desdits vainqueurs de la Bastille un brevet honorable pour exprimer leurs services & la reconnaissance de la nation, & que dans tous les actes qu'ils passeront, il leur sera permis de prendre le titre de vainqueurs de la Bastille. »

- Source : Journal des États généraux convoqués par Louis XVI, 21 juin 1790, p. 14-15

Questions sur le document 7 :


1) Comment l’Assemblée nationale justifie-t-elle ce décret ?

2) En quoi consiste ce titre de « vainqueur de la Bastille » ?

Le 14 juillet devient aussi une fête patriotique. La fête de la Fédération, en 1790, permet ainsi de célébrer le premier anniversaire de l’événement. Mais ce que l’on célèbre, ce n’est pas tant la journée d’insurrection populaire, que l’unité et la concorde de la nation, pourtant déjà mises à mal en France. Le choix du Champ-de-Mars relègue la Bastille elle-même au second plan. La fête en elle-même, grandiose, devient la fête-modèle de l’époque révolutionnaire (Mona Ozouf).

Ce même 14 juillet 1790, Palloy organise une fête parallèle au milieu des ruines sur le terrain de la Bastille, avec des danses, sorte de premier « bal du 14 juillet ».

Document 8 : Sous le Directoire, un symbole qui perdure (séance du 8 thermidor du Conseil des Cinq Cents)

Sous le Directoire (1795-1799), le 14 juillet continue de susciter des commémorations officielles, mais le sens à donner à la célébration reste flou. Il s’agit davantage, pour un régime qui se méfie des excès du peuple, d’une fête de la concorde et de la liberté qu’un véritable hommage à l’insurrection populaire de 1789. 

«  Chénier, au nom d'une commission spéciale, fait un rapport sur la question de savoir si les fêtes du 9 thermidor, 10 août et 14 juillet seront célébrées séparément.

La commission pense, dit Chénier, qu'une fête historique, et c'est vraiment là une fête nationale, ne peut être raisonnabkement amalgamée avec nulle autre, et célébrée à une époque différente de la sienne.

Chénier propose un projet de résolution qui est adoptée en ces termes :

Art. Ier . La fête du 14 juillet, vieux style, sera célébrée chaque année, le 26 messidor, dans toutes les communes de la république.

II. La fête du 10 août, vieux style, sera célébrée chaque année, le 23 thermidor, dans toutes les communes de la république. »

- Source : Le Miroir, 27 juillet 1796, p. 4

Questions à partir sur doocument 8 :


1) En dehors du 14 juillet, quels sont les deux autres célébrations évoquées dans ce document et pourquoi ?

2) Quelle situation déplore Chénier dans cette séance ? Qu’est-ce que cela montre ?

Conclusion

La dimension symbolique de cet épisode révolutionnaire se poursuit tout au long du XIXe siècle. En 1830, c’est sur l’emplacement de l’ancienne Bastille que Louis-Philippe édifie la colonne de Juillet, destinée à commémorer les morts de juillet 1830 mais aussi ceux de 1789. La prise de la Bastille demeure alors une référence pour tous ceux qui défendent la liberté et la souveraineté populaire. En 1880, c’est donc la date du 14 juillet que les députés républicains choisissent comme fête nationale parmi toutes les journées révolutionnaires pressenties, jouant il est vrai sur la double symbolique que représente la date ; à la fois victoire populaire sur le despotisme en 1789 et unité de la nation en 1790.

Pour aller plus loin

Michel BIARD, Philippe BOURDIN, Silvia MARZAGALLI, 1789-1815, Révolution, Consulat, Empire, Paris, Belin, 2009

Héloïse BOCHER, Démolir la Bastille : l’édification d’un lieu de mémoire, Paris, Vendémiaire, 2012

Hervé LEUWERS, La Révolution française, Paris, PUF, 2011 [1e édition]

Jean-Clément MARTIN, Nouvelle histoire de la Révolution française, Paris, Perrin, 2012

Mona OZOUF, La fête révolutionnaire, 1789-1799, Paris, Gallimard, 1976

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Catherine Cimaz-Leroy est professeure d’histoire-géographie (Académie de Paris) et membre de l’APHG (Association des Professeurs d’Histoire-Géographie).