SÉQUENCE PÉDAGOGIQUE CLÉ EN MAIN
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Partenariat Histoire
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Ces séquences pédagogiques sont réalisées chaque mois en partenariat avec l'Association des Professeurs d'Histoire-Géographie (APHG) par des professeur·e·s membres de l'association.
Dans les programmes de l’enseignement secondaire :
Au collège, classe de 3e, Thème 1 : L'Europe, un théâtre majeur des guerres totales (1914-1945), Chapitre 2 : Démocraties fragilisées et expériences totalitaires dans l’Europe de l’entre-deux-guerres
Introduction
Les événements du 6 février 1934 s’inscrivent dans un contexte de grande instabilité politique, provoquée par le scandale financier de l’affaire Stavisky. Pour les ligues de droite et d’extrême droite, ce scandale illustre l’échec du gouvernement en place, voire des institutions républicaines elles-mêmes.
À travers les archives de presse de l’époque, cette séquence propose d’analyser les enjeux de cette crise, les réactions des différents camps politiques, ainsi que la mobilisation de la gauche, qui aboutira à la formation du Front populaire. L’objectif est de permettre aux élèves de comprendre comment une crise politique peut fragiliser la République et la démocratie, dans une Europe alors gagnée par la montée du fascisme.
Le 7 janvier 1934, dans un chalet près de Chamonix, un homme est retrouvé agonisant, une balle dans la tête. Il s'agit d'Alexandre Stavisky, un financier notoire, connu pour ses nombreuses escroqueries. Le lendemain, il succombe à l’hôpital, officiellement des suites d’un suicide. En cavale depuis la fin de l’année précédente, Stavisky était recherché après la révélation de sa dernière malversation financière : le détournement de près de 200 millions de francs au Crédit municipal de Bayonne.
Pour la presse de droite et d’extrême droite, la thèse du suicide est aussitôt contestée : il s’agirait, selon elle, d’un assassinat fomenté pour couvrir le gouvernement – dirigé par le radical Camille Chautemps –, accusé d’être impliqué dans le scandale. Cette affaire éclate dans un contexte de dépression économique, consécutive à la crise de 1929.
Le quotidien nationaliste et royaliste L’Action française, dirigé par l’écrivain Charles Maurras, figure parmi les principaux journaux accusant les dirigeants politiques en place d’avoir orchestré la mort du financier.
Doc 1. Extrait de l’Action française, 9 janvier 1934
« Les couloirs de la Chambre présentaient hier, veille de la rentrée du parlement, un spectacle répugnant à voir.
Depuis le matin, des parlementaires aux mines inquiètes, aux traits ravagés par la peur, traversaient les couloirs, s’efforçant de ne pas répondre aux questions qu’on leur posait à propos du scandale du Crédit municipal de Bayonne.
Les radicaux étaient consternés. Leur Garat arrêté, leur Dalimier compromis, leur André Hesse, vice-président de l’assemblée, convaincu d’avoir fait mettre Stavisky en liberté, leur Bonnaure avocat de l’escroc et d’autres, d’autres dont on chuchotait les noms, comme devant être livrés en pâture à l’opinion publique au cours des débats sur les interpellations relatives à cet énorme scandale.
L’on peut dire que la terreur régnait parmi la cohorte très nombreuse de tous ceux dont les noms, au cours de l’enquête et de l'instruction, pouvaient être livrés, comme ayant été plus ou moins arrosés, ou traités à table par le bel Alexandre.
On en voyait tressaillir à l'évocation de certaines révélations qui pourraient être faites sur les sportules libéralement accordées par le voleur de l'épargne à certains députés radicaux, pour assurer leur succès aux dernières élections.
Le bruit courait en effet que Stavisky aurait distribué cinq ou six millions au parti radical pour soutenir sa campagne électorale et qu'il avait précieusement conservé par devers lui la liste de tous ses stipendiés.
Ouf ! on respire enfin
Bref, un vent de panique soufflait sur certains groupes de la majorité quand, vers 17 heures, une nouvelle venait éclater comme une bombe, dans les couloirs de la Chambre : « Stavisky vient de se suicider à Chamonix. »
C'était alors une sorte de détente délirante. On voyait les parlementaires tout à l'heure si inquiets, si crispés, s'aborder en souriant, en riant presque tout haut. Des gens qui, quelques instants auparavant, semblaient se fuir, s'abordaient mains tendues, comme des rescapés d'une catastrophe.
Le spectacle était écœurant.
Ceux-là mêmes qui ne dominaient et comprenaient bientôt l'importance et s'étonnaient de la rapidité avec laquelle ce suicide si formidablement à propos avait pu s'affirmer et se conclure adroitement, se demandaient avec une vague possibilité de se détruire. »
- L’Action française, 9 janvier 1934, p2
Question :
Pourquoi, selon le quotidien d’extrême droite l’Action française, les députés sont rassurés par l’annonce de la mort de Stavisky ?
Pour l’extrême droite, l’affaire Stavisky prouve que le régime parlementaire est fondamentalement corrompu. À l’antiparlementarisme se mêle souvent l’antisémitisme. D’origine juive, Stavisky devient, aux yeux des antisémites, l’incarnation de leurs préjugés : il est associé à l’image du « cosmopolite », cet éternel étranger supposément conspirant contre la France pour servir ses propres intérêts. Charles Maurras exprime cette vision dans L’Action française du 1er janvier 1934.
Doc 2. Extrait de l’Action française, 1er janvier 1934
« Oui ou non, le pays est-il le sujet et la proie d’un extraordinaire grouillement d’espions dont la plupart sont des Juifs sans aveu, ni feu ni lieu ? Oui ou non, l’affaire des espions juifs internationaux, l’affaire du puissant Alexandre Stavisky montrent-elles à quel degré de putréfaction cette pacifique invasion étrangère a réduit certaines plaques épidermiques et, peut-être, certains organes profonds du pays légal, de l’État ?
Pas de doute, il en est ainsi : pourquoi hésiter ?
Plus on attend, plus le mal s’étendra et se creusera ; plus la France cessera d’appartenir aux Français. »
- L’Action française, 1er janvier 1934, p1
Question :
Comment le quotidien d’extrême droite l’Action française utilise-t-il l’affaire Stavisky pour défendre ses idées antisémites ?
Si l’antisémitisme reste principalement propagé par les journalistes d’extrême droite, le gouvernement n’échappe pas aux critiques de l’ensemble de la presse d’opposition. Ces attaques trouvent un fondement dans les liens avérés entre certains responsables politiques ou proches du pouvoir et Alexandre Stavisky. Parmi eux, Albert Dalimier, le ministre des Colonies, contraint de démissionner dès le 9 janvier. Les tensions s’intensifient lorsque la Chambre des députés rejette la création d’une commission d’enquête parlementaire.
En janvier, plusieurs manifestations agitent les rues de Paris. Initialement organisées par les ligues d’extrême droite, telles que la ligue d’Action française fidèle aux idées de Maurras, ces rassemblements finissent par rallier d’autres forces de droite. Le préfet de police, Jean Chiappe, réputé proche de l’extrême droite, semble tolérer ces mouvements. Face à la montée des protestations, le ministre de la Justice, Eugène Raynaldy, démissionne le 27 janvier 1934, suivi par l’ensemble du gouvernement Chautemps le lendemain.
Le radical Édouard Daladier prend alors la tête du gouvernement, mais son arrivée déplaît aux militants de droite, notamment après sa décision de limoger Chiappe. Ce dernier est accusé d’avoir rencontré Stavisky en février 1933 et d’avoir entravé la procédure judiciaire contre lui. Malgré ces soupçons, Chiappe bénéficie du soutien des ligues d’extrême droite, qui appellent à manifester le 6 février, jour de la présentation du gouvernement Daladier à la Chambre des députés.
Ce mouvement de contestation mobilise également des associations d’anciens combattants, parmi lesquelles les Croix de Feu (à l’extrême droite), l’Union Nationale des Combattants (à droite) et l’Association Républicaine des Anciens Combattants (à gauche).
Le 6 février, six points de rendez-vous sont donnés à proximité des lieux pouvoir, en particulier de la Chambre des députés. Du côté de l’extrême droite, l’un des slogans scandés par les militants est « Révolution nationale ». Il est notamment promu par Solidarité française, ligue fondée par l’industriel et ancien propriétaire du Figaro, François Coty, et comptant officiellement 180 000 adhérents à Paris et 80 000 en province. À gauche, on chante la Marseillaise, et parfois l’Internationale ; on crie aussi « Les Soviets partout ».
Parmi les militants les plus radicaux, on trouve les Camelots du roi, le service d’ordre de l’Action française. Cette ligue, dirigée par Charles Maurras, diffuse une idéologie nationaliste et anti-républicaine à travers son journal. L’Action française revendique alors environ 8 000 membres à Paris et 60 000 en province, un effectif moindre comparé à Solidarité française ou aux Croix de Feu, qui prétendent rassembler respectivement 140 000 adhérents en province et 20 000 dans la capitale.
Contrairement à ces ligues, l’Action française ne se contente pas de critiquer le régime, elle aspire à renverser la République, surnommée « la Gueuse » par ses militants, pour instaurer une « monarchie traditionnelle, héréditaire, antiparlementaire et décentralisée ». Ce régime devrait en outre mener une politique xénophobe, antisémite et hostile aux valeurs de 1789.
Lorsque les manifestations tournent à l'émeute, les militants de l’Action française figurent parmi les premières victimes des balles policières. Les affrontements du 6 février se soldent par 15 morts, 14 manifestants et un policier. Le lendemain, Charles Maurras publie une réaction dans le journal de l’Action française.
Doc 3. Extrait de l’Action française, 7 février 1934
« Trois possibles en présence :
Ou les assassins seront décrétés d'accusation par une Chambre, un Sénat, un Conseil municipal assez hardi, pour parler au nom de la France et de l'humanité.
Ou le peuple français mettra les assassins hors la loi.
Ou tout sera fini, d'un peuple tombé assez bas pour se résigner à être gouverné, trahi, vendu, escroqué, dépouillé et finalement mitraillé par l'écume de ses latrines.
Eh ! bien, non. Quelque chose de fort et de noble achève de se révéler dans les affreuses tueries d'hier. C'est l'impavide courage civique de la foule française sur laquelle on tirait.
Il n'y a pas eu de panique.
Il n'y a pas eu de désordre.
La foule a reculé pied à pied, et, toutes les fois qu'elle l'a pu, elle a repris hautement, vigoureusement l'avantage.
Jamais peut-être on n’avait vu ce degré stoïque d’abnégation dans une masse commandée et dirigée par la seule unanimité d’un sentiment juste, d’un plus juste ressentiment. Rien ne l’a découragée. Elle n’a pas cessé de se ruer à l’assaut, d’y revenir, de s’y obstiner sous le feu.
Des mots joyeux d’anciens combattants ont couru :
— Mon vieux, ma vieille, on tire, on tire, mets-toi derrière le mur.
Comme il n’y a pas de mur place de la Concorde, on riait et on encaissait.
Tissier de Mallerais me dit :
— Oui, sans doute, cette foule a été héroïque. Et cet héroïsme avait quelque chose d’affreusement naturel. À combien de Français la République des voleurs n’a-t-elle pas rendu la vie écœurante ? Comment craindre la mort quand il s’agit d’abattre un régime, un pouvoir qui a organisé la banqueroute de notre coûteuse victoire, qui met et qui garde au pinacle les traîtres condamnés de la guerre, a dilapidé nos finances, tué notre économie, usé et ruiné notre justice, n’a plus d’autorité que celle d’une force qui devrait garder notre paix, protéger notre travail et nos frontières, et dont il se retourne des pilleries, empoisonner la moralité publique et nous déshonorer devant le monde entier !
Il nous dégoûterait de la vie si nous devions rester ses esclaves. »
- L'Action française, 7 février 1934, p1
Question :
Comment Charles Maurras exprime-t-il le rejet du régime politique en place, et quels sentiments cherche-t-il à provoquer chez le lecteur ?
Le régime résiste à l’émeute, mais non le gouvernement. Le 7 février, Daladier démissionne à son tour. Il est remplacé par un autre homme du parti radical : l’ancien ministre et président de la République Gaston Doumergue. Figure rassurante, il est investi le lendemain pour constituer un gouvernement d’union nationale.
Les événements du 6 février 1934 ne furent pas le fruit d’un complot ou une tentative de coup d’État. Cependant, la presse de gauche parle de l’échec d’un « coup de force fasciste ». Le 7 février, le journal socialiste Le Populaire utilise cette rhétorique dans son bandeau et dans ses articles.
Doc 4. Extrait du journal Le Populaire, 7 février 1934
« La réaction a voulu avoir sa journée. Elle l’a eue. Le sang a coulé. On parle de près de 29 morts. Le nombre des blessés doit s’élever à plusieurs centaines.
La camelote royale, les Jeunesses Patriotes, les « Croix de Feu », les anciens combattants nationalistes, tous ont « donné ».
C’était une véritable émeute, préparée, organisée avec soin, avec méthode, par les formations fascistes. C’était un complot armé contre le régime républicain.
Il a échoué.
Cependant, les instigateurs de ce mouvement avaient choisi le moment le plus favorable. Le nouveau gouvernement se présentait à la Chambre dans une atmosphère de fièvre. Le préfet de police venait d’être relevé de son poste. Il ne pouvait assurer une organisation normale dans l’organisation policière. […]
On lira plus loin le récit de la journée et de la nuit. On se rendra compte de la sauvagerie calculée des émeutiers, excités par la presse nationaliste et fasciste, chauffés à blanc par les agitateurs à la solde de tous les Coty de presse et d’aventure, appelés dans la rue par les Topaze de l’Hôtel de Ville.
C’est la lie de la réaction qui a déferlé.
C’est par la généreuse colère de la classe ouvrière qu’elle eût dû être balayée.
Hélas ! la classe ouvrière est divisée. Elle était hier encore divisée. Le sera-t-elle encore aujourd’hui, demain ?
Le Parti socialiste l’appelle tout entière à l’unité totale dans l’action qui s’impose.
Qu’en face on réponde enfin « présent » et fascisme, nationalisme, royalisme seront anéantis. »- Le Populaire, 7 février 1934, p1
Question :
Comment le journal Le Populaire analyse les événements du 6 février 1934 ? Quels objectifs propose-t-il à la classe ouvrière pour répondre à cette crise ?
Pour la gauche, la mobilisation de la droite et de l’extrême droite le 6 février 1934 représente une véritable menace pour la République, dans un contexte international marqué par le développement du fascisme et plus généralement de l’autoritarisme politique. Les partis communiste et socialiste appellent ainsi à l’union de la gauche. Le 12 février, celle-ci commence à se concrétiser par une grève générale et des manifestations réunissant 250 000 personnes. Au cours de ces rassemblements, communistes et socialistes défilent ensemble au cri d’« unité ! »
Question :
En quoi cette photographie illustre-t-elle la réaction de la gauche face aux événements du 6 février 1934, et comment les manifestants expriment-ils leur opposition à la droite et à l’extrême droite ?
Le rapprochement entre les mouvements de gauche aboutit l’année suivante à la formation d’un Front populaire, encouragée par la réorientation de la stratégie des communistes à l’échelle internationale : Moscou promeut désormais l’union de la gauche face à la montée de la menace fasciste.
Conclusion
Les événements du 6 février 1934 reflètent les profondes fractures qui divisent la société française dans l’entre-deux-guerres. Ils accentuent la défiance envers le gouvernement et, chez les courants les plus radicaux, alimentent une hostilité directe envers les institutions républicaines. Cependant, ces troubles suscitent également une réaction ferme des forces de gauche, qui décident rapidement de s’unir face à ce qu’elles considèrent comme un péril imminent pour la République et la démocratie.
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