C'est ce blues-là, très orchestral, qui arrive en France par le biais de musiciens comme Jimmy Witherspoon, T-Bone Walker, John Lee Hooker ou Big Joe Williams. Ce sont alors les artistes américains les plus célèbres qui traversent l'Atlantique. Avec le succès rencontré par American Folk Blues Festival, de plus en plus de jeunes vont se baser sur le blues pour faire leur propre musique. Cela va bien sûr influencer les Rolling Stones et les Who à leurs débuts en Angleterre…
Et au niveau des productions hexagonales ?
Il faudra attendre les années 1970 pour entendre les premiers musiciens français, Benoît Blue Boy, Cisco, Bill Deraime, ou même Henry Salvador, qui a fait quelques titres. Dans les années 1950, 60 et 70, le mouvement s'est développé, avec de plus en plus d'amateurs, et les premières revues spécialisées comme Rythm'n'blues Panorama ou Soul Bag. Les interviews, les reportages, les tournées, les festivals ont suscité un intérêt grandissant.
A cette époque, les artistes américains étaient accueillis comme des héros lorsqu'ils montaient sur scène, même s’ils ne remplissaient pas des stades. Cela a incité les musiciens français à se tourner vers cette musique.
Où en est le blues aujourd'hui dans notre pays ?
Les festivals se sont multipliés, surtout depuis une trentaine d'années, et l’on compte également beaucoup d'artistes français. Le problème, c'est que le blues est d'abord une parole et un texte avant d'être une musique. Du coup, les productions françaises ont énormément de mal à s'exporter et sont peu considérées à l'étranger. C'est très difficile de transformer un message aussi individuel et personnel, qui vient fondamentalement des tripes, en quelque chose qui touchera tout le monde.
Par ailleurs, le problème du blues, mais cela vaut pour le jazz, c'est que c'est une musique qui est devenue académique, et qui, de ce fait, est bien moins vivante qu'auparavant.
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Historien, romancier, musicien et musicologue, Gérard Herzhaft est un des plus grands spécialistes français du blues et des musiques populaires américaines.