Séquence pédagogique

Genèse des notions de « crime contre l’humanité » et de « génocide »

le par - modifié le 15/02/2024
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Face aux violences de masse extrêmes actuelles, les notions de « crime contre l’humanité » et de « génocide » sont régulièrement invoquées et fréquemment confondues. Il s’agit de comprendre que leur genèse se fait dans le contexte précis du premier XXe siècle, et de mesurer ce qui rapproche et ce qui différencie ces idées. La presse permet d'observer l’évolution d’une opinion publique de plus en plus sensible aux violences de masse, et de suivre les débuts d’une justice internationale pour les victimes.

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Terminale générale histoire (La fin de la Seconde Guerre mondiale et les débuts d’un nouvel ordre mondial)

Terminale technologique histoire (Totalitarismes et Seconde Guerre mondiale)

Terminale générale, spécialité HGGSP histoire-géographie-géopolitique-sciences politiques (Thème 3 sur Histoire et mémoires – Introduction : les notions de crime contre l’humanité et de génocide, et le contexte de leur élaboration)

Terminale générale et technologique, Éducation morale et civique (Axe 2 : Repenser et faire vivre la démocratie - Conscience démocratique et relations internationales : la défense des droits de l’Homme ; le développement du droit pénal international (le droit applicable aux génocides, aux crimes de masse et aux violences extrêmes)

Introduction

Les notions de « crime contre l’humanité » et de « génocide » sont intimement liées à l’émergence du droit pénal international. Elles représentent des approches différentes des violences de masse les plus graves touchant les populations civiles. Si ces violences ne sont pas nouvelles, la genèse de ces deux notions est récente. L’idée de « crime contre l’humanité », évoquée de manière sporadique dès le XIXe siècle alors que s’affirme un droit international de la guerre et un droit humanitaire, devient récurrente dans le premier XXe siècle. Néanmoins, il faut attendre la fin de la Seconde Guerre mondiale et le procès de Nuremberg entre 1945 et 1946 pour que l’idée, jusqu’alors avant tout morale, ne devienne un crime puni par la justice internationale naissante. Le mot « génocide » inventée à la même époque pour caractériser la politique nazie d'extermination systématique des Juifs d’Europe, s’impose en parallèle en 1948 à l’ONU. Il est donc intéressant avec les élèves de se pencher sur le contexte d’élaboration de ces deux notions dans un siècle marqué par les violences extrêmes.

Une opinion publique plus sensible aux violences de masse contre les populations civiles (début XXe siècle)

Le terme de « crime de lèse-humanité » est plusieurs fois employé dans la seconde moitié du XVIIIe siècle pour désigner l’esclavage et son processus de déshumanisation. Au début du XIXe siècle, l’idée d’une intervention politique ou militaire d’un Etat dans les affaires d’un autre État « pour cause d’humanité » est également évoquée. Elle se heurte cependant aux juristes qui considèrent qu’une telle ingérence pour mettre fin aux crimes d’un État contre sa population relève plus de la morale que du droit. Il faut attendre les conventions de Genève en 1864 sur droit international humanitaire et celles de La Haye en 1899 et 1907 sur le droit de la guerre pour que les « lois de l’humanité » soient clairement évoquées. Ce premier « droit des gens », s’il n’aboutit pas encore à une vraie justice internationale, nourrit la réflexion, ce que l’on retrouve d’ailleurs dans la presse française.

 

Document 1 : la guerre des Boers (1899-1902) dénoncée dans la presse française

« Nous sommes encore eu présence des violations les plus éclatantes du droit des gens. Il y a, même dans les aventures de la pire violence, des lois communes à toute l’humanité et dont la conservation constitue un intérêt de premier ordre pour l’humanité tout entière. Ce sont ces lois qui ont été. non pas enfreintes au milieu des passions de la lutte, dans des vas plus ou moins isolés,mais officiellement, systématiquement déchirées par le gouvernement anglais. Voilà ce qui constitue la différence fondamentale entre les actes reprochés à nos voisins et les excès passés des autres armées, dont ils essayent de tirer argument.

Emprisonner et parquer toute une population, y compris les femmes et les enfants, pour les soumettre a une savante organisation de l’extermination de tout mi peuple, cela sort des horreurs ordinaires de la guerre. »

- Extrait d'un article de Camille Pelletan (1846-1915, historien, journaliste et député socialiste qui siège à l'Assemblée nationale de 1881 à 1915), L'Éclair, 21 janvier 1902, p. 1

Document 2 : Georges Clemenceau dénonce en 1905 les massacres des Herero par les Allemands

« Dans ce document où éclate la haute supériorité morale dont nos voisins d'outre Rhin aiment à se vanter, le grand général des soldats allemands et du puissant empereur » informe « la nation des Herreros », après les avoir accusés « de meurtres, de vols et d'actes de barbarie sur les prisonniers », qu'il les retranche du nombre des « sujets allemands ». Dès lors, à ses yeux, ils n'ont plus de raison d'être. C'est pourquoi une logique impeccable le conduit à décréter leur annihilation. [...]

Les Herreros ayant démérité de la clémence impériale parce qu'ils ont tué des prisonniers, le général von Trotha ne peut moins faire que de les imiter. Que dis-je, il les dépasse de toute la puissance de son germanisme civilisé. « La nation des Herreros, annonce-t-il, doit disparaître du territoire. » Il les y contraindra par le canon. Mais comme cela ne peut suffire, il est décrété par le général von Trotha que « tout Herrero, avec ou sans fusil, avec ou sans bétail, qui sera trouvé sur le territoire de la colonie sera fusillé ». « Je ne recevrai plus dans mes lignes, ajoute-t-il, les femmes et les enfants. Je vous les renverrai ou je ferai tirer sur eux. »

- Extrait de l'Aurore, 21 août 1905, p.1

 

Document 3 : les massacres des Arméniens dans l’empire ottoman pendant la Première Guerre mondiale

Dès le 24 mai 1915, les trois ministres des Affaires étrangères de l’Entente adressent une déclaration commune au gouvernement de l’Empire ottoman pour dénoncer les massacres de la population arménienne et évoquer « les nouveaux crimes de la Turquie contre l’humanité et la civilisation ».

«  Parmi les plus sombres crimes que cette guerre ait déchaînés, s'inscrit au premier rang le massacre du peuple arménien. Un tel forfait ne déshonore pas qu'un pays : il entache l'honneur humain. Se renouant aux pires tragédies do l’histoire, il fait douter de tout : conscience, progrès, civilisation. Un croit se replonger dans une très ancienne et sanglante chronique : que do telles barbaries aient pu se dérouler aux portes de l'Europe, en plein XXe siècle, voilà qui fait désespérer de l'avenir. Jamais l'instinct du meurtre ne s'allia si férocement à d'aussi basses cruautés. Rien, même son écartèlement, ne saurait effacer celte tache de sang qui souille à tout jamais la carte de l'Empire. [...]

Le but tenait en ces simples mots : extermination totale de la race arménienne. Six grands vilayets furent ravagés par le fer et le feu : sur deux millions d'êtres humains que comprenait ce peuple, douze cent mille ont été impitoyablement biffés de la surface de la terre. »

- Extrait du Petit Marseillais, 5 mars 1919, p. 1

 

Questions à partir des documents 1 à 3 :


1) A l’aide des articles complémentaires de RetroNews et de vos recherches personnelles, faites une présentation succincte des trois conflits évoqués et des massacres qui en découlent. Quel type de guerre est évoqué par les deux premiers documents ?

2) Relevez les expressions employées par les journalistes pour rendre compte de la volonté d’éradiquer par la violence des groupes entiers de populations civiles.

3) Quel mot récurrent dans les documents 1 et 3 montre que ces crimes sont d’une autre dimension que les crimes classiquement liés à la guerre ?

En 1919, lors de la conférence de la paix, la commission sur les responsabilités de la guerre propose la création d’un tribunal international pour punir les Allemands et les Turcs coupables « de violations des lois de la guerre et de l’humanité ». Les articles 227 à 230 du traité de Versailles du 28 juin 1919 prévoient ainsi de poursuivre devant les tribunaux les responsables allemands, et notamment l’empereur Guillaume II. Mais aucun tribunal international ne voit en définitive le jour. Le traité de Sèvres de 1920 évoque également la possibilité de juger internationalement les Turcs responsables des crimes commis contre les Arméniens, mais sa mise en œuvre se révèle également rapidement illusoire. L’idée de crime contre le genre humain reste donc en marge de la sphère juridique pendant toute la période de l’entre-deux-guerres.

Après la Seconde Guerre mondiale, le « crime contre l’humanité », nouveau chef d’accusation au procès de Nuremberg

Il faut attendre la Seconde Guerre mondiale et l’ampleur des crimes nazis, au premier rang desquels la Shoah, pour que le « crime contre l’humanité » devienne une nouvelle infraction pénale en droit international.

Les accords de Londres du 8 août 1945 instituent un « Tribunal militaire international » pour juger les principaux responsables nazis encore en vie. Parmi les quatre chefs d’inculpation retenus, le « crime contre l’humanité » fait alors son apparition. Il est proposé par un juriste anglais, d’origine juive polonaise, Herscht Lauterpacht.

Il faut en effet pouvoir juger des crimes ne rentrant pas dans les crimes de guerre dans la mesure où ils ont aussi touché des populations allemandes ou appartenant à des pays alliés de l’Allemagne. Néanmoins, ce nouveau chef d’inculpation suscite des critiques puisqu’il est contraire aux principes de non-rétroactivité du droit. Une restriction y est donc apportée pour limiter cette atteinte au droit ; il doit être lié à l’un des autres crimes prévus par le Statut du Tribunal, notamment le crime de guerre mieux ancré dans la pratique du droit. Après le procès de Nuremberg (1945-1946), le « crime contre l’humanité » est repris au procès de Tokyo (1946-1948) contre les criminels japonais.

Document 4 : Le procès de Nuremberg et le chef d’accusation de « crime contre l’humanité » 

«  Les meurtres viols, pillages, etc..., sont réprimés par tous les Codes des nations civilisées, et le fait qu’ils aient été commis à l'occasion de la guerre n’en altère ni le caractère ni la gravité.

Mais les juges de Nuremberg sont allés beaucoup plus loin en rangeant, parmi les chefs d’accusation, le « crime contre l’humanité ». Il s'agit essentiellement des actes de cruauté commis au nom des théories racistes et qui ont ajouté aux souffrances inhérentes à l'état de guerre des exactions si monstrueuses qu'aucune législation n’avait pu les prévoir. Les haines de races ou de religion ont. donné lieu, dans le passé, à des persécutions et à des massacres. Mais jamais elles n'ont déchaîné un pareil raffinement de cruauté, de racisme méthodique et de cynisme. La loi morale l’emporte ici sur toutes les codifications du droit écrit.

On pourrait d’ailleurs dire que ces crimes sont, eux aussi, de ceux que le droit commun qualifie et réprime. Ils s'en distinguent cependant, non seulement par leur monstrueuse bestialité, mais encore par la propagande de haine qui les imprègne et le bas instinct d'intolérance dont ils constituent l'exploitation.

Pour cette raison, il y aurait eu intérêt à les disjoindre des crimes de guerre proprement dits — car ils préexistaient à la guerre — et a les faire juger par un tribunal où non seulement les belligérants, mais toutes les nations civilisées, auraient eu un représetant. Le verdict eût ainsi été rendu au nom de la conscience humaine, au lieu de paraître s'inscrire dans un règlement de compte.» 

- Extrait de La Croix, 3 octobre 1946, p.4

Questions à partir du document 4 :


1) Comment sont caractérisés les « crimes contre l’humanité » dans le document ?

2) Qu’est-ce que les différencient des crimes de guerre ?

3) Quelle critique émet le journaliste dans cet article ?

Le « génocide », un néologisme qui s’impose en parallèle dans le droit pénal international

La notion de « crime contre l’humanité » n’est pas la seule à naître après la Seconde Guerre mondiale. Un autre juriste, américain, également d’origine juive polonaise, Raphael Lemkin, crée la notion de « génocide », exposée dans un livre en 1944, pour désigner plus spécifiquement la Solution finale.

Sa réflexion sur le caractère singulier de ces crimes n’est pas nouvelle alors et puise ses racines dans le massacre des Arméniens. Conseiller auprès du procureur américain Robert Jackson à Nuremberg, il tente en vain de faire entrer le « crime de génocide » parmi les chefs d'accusation du procès.

Le mot est cependant sporadiquement employé dans les réquisitoires britannique et français, mais seulement en tant que terme descriptif. Lemkin se bat ensuite pour faire reconnaître par l’ONU ce nouveau mot de « génocide ».

Document 5 : Raphael Lemkin invente le néologisme de « génocide »

« Il fut stupéfait que personne encore n'ait songé à châtier ce crime ni même à lui donner un nom. Il comprit que c'était autre chose qu'une série de crimes, de meurtres additionnés, que ce crime voulait atteindre le groupement humain plus que l'individu. Il le baptisa génocide (du grec genos, tribu, groupement, et du latin cidere). Il le définit : destruction préméditée et en masse d'un groupe humain pour en anéantir la race, la nationalité, la langue, la religion ou les opinions politiques. »

- Extrait de L'Aube, 29 septembre 1948, p. 2

Document 6 : Interview de Raphael Lemkin en 1948 venu défendre à l’ONU le projet d’une convention pour punir « le crime de génocide »

« Aussi demandai-je sans ambages : « Génocide, dites- vous ? Mais encore ? »

-  Le fait de provoquer directement ou indirectement la mort de membres de groupes humains, enchaîne mon interlocuteur, de stériliser des êtres par la force, de leur enlever leurs enfants ou de briser leur famille - de même que le fait de détruire les institutions et les formes grâce auxquelles la vie spirituelle d'un groupe trouve son expression (édifices, objets, écoles, bibliothèques, etc.), constitue un acte criminel. On peut donc distinguer plusieurs catégories de génocides : physique, biologique, culturel.

- Ce dernier est sans doute le plus dangereux.

- À coup sûr, car c'est par lui que l'on atteint l'âme et le coeur de l'humanité. Les nations, on l'a dit, sont des familles d'esprit. Nous voulons aussi protéger cet esprit qui se manifeste par la contribution originale des différents groupements nationaux et religieux à l'ensemble de la civilisation du monde. »

- Extrait de Combat, 2 novembre 1948, p. 3

Questions à partir des documents 5 et 6 :


1) Document 5 : Que signifie ce nouveau mot ? Qu’est-ce qui le différencie du « crime contre l’humanité » ?

2) Documents 5 et 6 : Quels groupes peuvent être ciblés selon Lemkin et par quels moyens d’anéantissement ?

Dès décembre 1946, l'Assemblée générale de l'ONU reconnait le « génocide » comme un « crime du droit des gens ». La campagne d’opinion menée par Lemkin (dont le document 6 est un exemple) aboutit par ailleurs le 9 décembre 1948 à l’adoption de la « Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide », qui donne une définition juridique à la notion. L’article 2 définit le génocide comme l’un :

 « des actes ci-après, commis dans l’intention de détruire, en tout ou en partie, un groupe national, ethnique, racial ou religieux, comme tel : a) meurtre de membres du groupe ; b) atteinte grave à l’intégrité physique ou mentale de membres du groupe ; c) soumission intentionnelle du groupe à des conditions d’existence devant entraîner sa destruction physique totale ou partielle ; d) mesures visant à entraver les naissances au sein du groupe ; e) transfert forcé d’enfants du groupe à un autre groupe. »

Le « génocide » fait donc son entrée dans le droit pénal international. Il constitue ainsi un type particulier de « crime contre l’humanité ».

Questions à partir des documents 5 et 6 et de l’article 2 de la Convention définissant le crime de génocide :


1) Quelles restrictions sont apportées à la définition du « génocide » dans la Convention de 1948 (article 2) par rapport à celle donnée par Lemkin ?

2) En quoi le contexte géopolitique peut-il expliquer ces restrictions ?

La notion, encore peu stabilisée dans l’opinion publique, est alors employée à de nombreuses reprises dans les années qui suivent par des groupes de victimes, au vu de forte charge symbolique qu’elle renferme.

 

Document 7 : la violence dans les Etats baltes annexés par l’URSS, un génocide ?

Les trois États indépendants d'Estonie, Lettonie et Lituanie sont envahis et occupés par l’URSS dès juin 1940. Après la guerre, l’URSS se maintient dans ces territoires et procède à une soviétisation accélérée des sociétés.

« « L incident aérien de la Baltique pourrait très bien servir de prétexte au monde pour jeter un nouveau regard du côté des États baltes et examiner la conduite des Soviets dans cette région », écrit ce matin le « New York Times » en éditorial.

« Sur six millions d’habitants, ajoute le journal, les Soviets en ont déporté près de deux millions dans le but évident d’éloigner une population hostile des nouvelles bases militaires soviétiques et la remplacer par un mur humain de Russes loyaux, d’autant plus prêts à se battre qu’ils bénéficient de biens volés ».

« C’est là un cas de génocide aussi clair que ceux dont se sont rendus coupables les nazis, mais les accusations portées aux Nations Unies par les représentants des États baltes n’ont évoqué comme réponse qu’un silence embarrassé. »

- Extrait de Combat, 26 avril 1950, p. 3

Questions à partir du document 7 :


1) Quel Etat est considéré comme génocidaire ? par quels groupes et pour quelles raisons ?

2) Pourquoi cette accusation ne peut aboutir selon la définition du « génocide » ?

Conclusion

Les notions de « crime contre l’humanité » et de « génocide » naissent donc dans le contexte d’espoir d’un nouvel ordre mondial fondé sur les droits de l’Homme. Néanmoins, guerre froide oblige, elles sont mises en sommeil pendant quelque quarante ans. Le projet d’une cour criminelle internationale permanente, pourtant inscrit dans la Convention de 1948, est ajourné dès le milieu des années 1950. Il faut attendre les années 1990, la fin de la guerre froide et de nouveaux crimes de masse en ex-Yougoslavie et au Rwanda avec le génocide des Tutsi, pour que ces notions reviennent au centre du débat public.

La création des Tribunaux pénaux internationaux pour l’Ex-Yougoslavie (TPIY) en 1993 et le Rwanda (TPIR) en 1994 représente la première étape vers le renouveau de la justice internationale. L’année 1998 est alors marquée, en juillet, par la signature du Statut de Rome prévoyant la création d’une Cour pénale internationale et étoffant la notion de « crime contre l’humanité » et, en septembre, par la première condamnation au monde pour crime de « génocide » dans le cadre du TPIR.

Connaître l’histoire de ces deux notions permet donc aux élèves de savoir les différencier, tout en abordant l’émergence du droit pénal international. Cela est d’autant plus important que la notion de « génocide », en raison de sa connotation hautement symbolique de « crime des crimes », connait ces dernières décennies un usage inflationniste et parfois instrumentalisé, qui brouille sa compréhension.  

 

Pour aller plus loin

Becker Annette, Messagers du désastre. Raphael Lemkin, Jan Karski et les génocides, Paris, Fayard, 2018

Bruneteau Bernard, Génocides : usages et mésusages d’un concept, Paris, CNRS éditions, 2019

Perego Simon, « Génocide : histoire et usages d’un concept », Encyclopédie d'histoire numérique de l'Europe, mis en ligne le 23/06/20, consultable sur le site de l'EHNE

Sands Philippe, Retour à Lemberg, Paris, Albin Michel, 2017

Semelin Jacques, Purifier et Détruire. Usages politiques des massacres et génocides, Paris, Le Seuil, « La Couleur des idées », 2005

Ternon Yves, Guerres et Génocides au XXe siècle, Paris, Odile Jacob, « Hors collection », 2007

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Catherine Cimaz-Leroy est professeure d’histoire-géographie (Académie de Paris) et membre de l’APHG (Association des Professeurs d’Histoire-Géographie).

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