Les Trois Glorieuses du 27 au 29 juillet 1830
La révolution de Juillet renverse Charles x durant les Trois Glorieuses du 27 au 29 juillet. Delacroix l’a immortalisé dans sa Liberté guidant le peuple. Louis-Philippe devient roi de France et instaure une monarchie libérale et parlementaire, appelée Monarchie de Juillet qui cherche à concilier monarchie et héritages de 89, touchant les aspirations populaires et républicaines.
L’échec de la politique réactionnaire de Charles X
La Restauration, entreprise par Louis XVIII, établit une monarchie constitutionnelle qui tente de concilier des principes d’Ancien Régime et des héritages révolutionnaires. Charles X mène une politique très réactionnaire en s’appuyant sur les ultras, partisans d’un retour à l’Ancien Régime, exécrant les principes de 1789 (voir notre long format sur le sacre de Charles X). Face à la contestation croissante des libéraux, il décide de nommer le 8 août 1829 le prince de Polignac président de Conseil, accompagné des plus extrémistes des ultras.
Le roi entre en conflit le 2 mars 1830 avec la Chambre des députés après un discours autoritaire et menaçant : 221 députés votent une Adresse au roi, lui signifiant que le gouvernement n’a pas la confiance de l’assemblée et exigeant une monarchie parlementaire. S’en est trop pour Charles X qui dissout la Chambre le 16 mai et qui justifie sa décision par une proclamation relayée par la presse à l'instar du Journal des débats politiques et littéraires du 15 juin 1830. Les élections législatives du 23 juin et du 3 juillet sont un nouveau triomphe pour les libéraux : les électeurs soutiennent l’Adresse des députés.
Tentant un coup de force (« un coup d’État » selon Thiers) en s’appuyant sur l’article 14 de la Charte, Charles X signe le 25 juillet 1830 quatre ordonnances qui prévoient la suspension de la liberté de la presse (voir notre long format sur La suspension de la liberté de la presse), la dissolution de la Chambre des députés, la réduction du corps civique et la proclamation de nouvelles élections. « La France libérale a peur » déclare Le Constitutionnel du 25 juillet 1830. Ces décisions publiées le 26 juillet, déclenchent une insurrection à Paris qui renverse le régime de Restauration.
Les journées révolutionnaires des 27, 28, 29 juillet 1830
Dès le 26 juillet, la tendance est à la résistance. À Paris, plusieurs catégories réagissent immédiatement : les fabricants et commerçants réunis à l’Hôtel de Ville pour procéder à l’élection des juges au tribunal de commerce, prévue pour ce jour-là ; les journalistes et les ouvriers typographes, qui se réunissent dans les bureaux du National pour organiser la résistance ; les étudiants se préparent à la révolte, tandis que les électeurs libéraux envisagent la grève de l’impôt.
Thiers et 44 journalistes rédigent dans les bureaux du National le 26 juillet une proclamation publique qui dénonce le caractère illégal des ordonnances et appelle à l’insurrection. Le mardi 27 juillet, les ouvriers des imprimeries manifestent et entraînent la population parisienne (artisans, boutiquiers) à se soulever. La ville commence à se hérisser de barricades.
Le 28 juillet, l’Hôtel de Ville et Notre-Dame sont aux mains des insurgés qui hissent le drapeau tricolore : l’intervention du peuple de Paris est décisive comme l’immortalise Delacroix . Le soir même, les députés, menés par Guizot, publient une protestation contres les ordonnances relayée dans Le Journal des débats et Le Constitutionnel le 29 juillet 1830. Ce dernier détaille les violents combats dans les rues de Paris et ses conséquences :
«Hommes ! aucun sentiment d'humanité n'émeut-il vos entrailles en lançant la mort sur des masses où elle frappe au hasard aussi bien le vieillard que le jeune homme, la femme et l’enfant faibles et innofensifs, que le garde national armé pour la défense de ces droits des Français qui ne sont pas moins les droits de l’armée de ceux des citoyens Militaires, n’y a-t-il rien au fond de vos poitrines qui murmure contre l’abus de la force ? hommes essentiellement voués à l’honneur, de quel œil regardez-vous vos armes souillées du sang des enfants et des femmes ?»
Et de poursuivre :
« voulez-vous qu’il reste dans l’histoire un monument d’éternelle honte pour les armes françaises, et qu’elle dise que la capitale de la France et de la civilisation, deux fois épargnée par l’invasion étrangère, a succombé sous des soldats nationaux !!! »
Le 29 juillet, Paris est aux mains des insurgés : les troupes de Marmont quittent la capitale et se replient sur Saint-Cloud, où réside Charles X. Les députés nomment symboliquement La Fayette commandant de la garde nationale et élisent une commission de 5 membres pour administrer Paris.
Cette révolution avant tout parisienne amène Charles X à abdiquer le 31 juillet : le duc d’Orléans accepte la lieutenance générale du royaume et fait son entrée dans Paris : il se fait acclamer par la foule, recevant l’accolade de La Fayette, sous un drapeau tricolore. Le 3 août les députés déclarent le trône vacant et appellent au trône le duc d’Orléans le 7 août. Le futur régime reste une monarchie mais plus libérale, les aspirations républicaines et populaires ont été étouffées. Ainsi, dans la journée du 30 est diffusée une proclamation rédigée, entre autres, par Thiers : « La République nous exposerait à d’affreuses divisions ; elle nous brouillerait avec l’Europe. Le duc d’Orléans est un prince dévoué à la cause de la révolution. Le duc d’Orléans est un roi citoyen. »
Louis-Philippe Ier (1773-1850)
Fils de Philippe-Égalité, duc d’Orléans, qui a voté la mort de son cousin Louis XVI, acquis aux idées révolutionnaires de 1789, il participe aux batailles révolutionnaires de Jemmapes et Valmy en 1792 avant d’émigrer. De retour en France durant la Restauration, il apparaît comme un recours à Charles X lors des journées révolutionnaires de juillet 1830. Louis-Philippe incarne une monarchie de Juillet, plus conservatrice que libérale. En butte à une opposition croissante, il est renversé en février 1848 par une nouvelle révolution, cette fois-ci républicaine.
L’avènement de la monarchie de Juillet et du libéralisme politique
Le 9 août 1830, après avoir prêté serment sur la Charte révisée, le duc d’Orléans est proclamé « Roi des français par la grâce de Dieu et la volonté nationale » sous le nom de Louis-Philippe Ier. La charte de 1830 crée une véritable monarchie parlementaire et devient un contrat entre le roi et la nation associant les deux formes de souveraineté. Le régime s’inscrit dans les principes de 1789 : le drapeau tricolore, symbole révolutionnaire devient le drapeau national. « La révolution de 1830 est consommée » déclare Le Journal des débats le 9 août 1830.
Porté au pouvoir par la bourgeoisie, hostile à la république et à l’autoritarisme, Louis-Philippe met en œuvre des réformes libérales : réforme électorale de 1831 (doublement du nombre d’électeurs, passant de 95.000 à 170.000, par un abaissement du cens électoral) et suppression de la censure.
La révolution de juillet 1830 dote la France d’un régime libéral et parlementaire dont les bases restent fragiles et contestées. Le nouveau régime ne satisfait ni les légitimistes, fidèles aux Bourbons, ni les républicains, ni la classe ouvrière naissante. Ils s’opposent aux orléanistes défendant une monarchie libérale et parlementaire dont Guizot et Thiers sont les porte-drapeaux. Devenant rapidement une monarchie conservatrice et bourgeoise, elle se raidit et réprime brutalement l’opposition républicaine et les manifestations sociales populaires comme la révolte des canuts à Lyon en 1831.
François Guizot (1787-1874)
Historien et homme politique français libéral, il contribue à l’instauration de la Monarchie de Juillet. Ministre de l’instruction publique, des Affaires étrangères, il devient chef du gouvernement entre 1840 et 1848 et mène une politique conservatrice qui suscite une opposition libérale et républicaine croissante.
Delacroix - "La Liberté guidant le Peuple"
"La Liberté guidant le peuple" : un tableau devenu icône de la république triomphante. Pourtant telle n'a jamais été l'intention de Delacroix, dandy-conservateur effrayé par les émeutes populaires. La fortune de l'oeuvre reposerait-elle sur un immense contresens ? Une vidéo d'actualité en plein débat sur l'égalité réelle des chances et sur l'identité nationale (le drapeau, Marianne...)
Bibliographie
Gabriel De Broglie, La monarchie de Juillet, Fayard, Paris, 2011.
Francis Demier, La France du XIXe siècle (1814-1914), Seuil, Paris, 2000.
Bertrand Goujon, Monarchies postrévolutionnaires, 1814-1848, Seuil, Paris, 2014.